Scandale : Article interdisant les conflits d’intérêt pour les ministres supprimé de la version finale du projet de constitution

 

Après l’utilisation des imams, des enfants, des baltajias et de l’argent pour la campagne du “Oui” au référendum, un autre scandale vient d’être révélé sur les réseaux sociaux. La version quasi-finalisée du projet de constitution, comportait une mention très intéressante qui interdisait aux ministres tout activité commerciale ou conflit d’intérêt durant leur mandat de ministre. Cette mention a été supprimée de la version finale du projet, publiée dans le bulletin officiel, et donc soumise à référendum. On peut comprendre qu’un arbitrage royal puisse trancher entre un état civil ou un état religieux. Mais pourquoi alors supprimer, à quelques heures du discours royal, une mention explicite dans la constitution qui aurait pu contribuer à moraliser la vie politique au Maroc, et éviterait des scandales comme celui de M. Moncef Belkhayat & Bull Maroc par exemple. Serait-ce un lobby de ministrables businessmen qui ne souhaiterait pas lâcher les affaires pendant leurs mandats de ministres?

Voici les deux versions avant et après suppression :

Article 87 soumis au référendum [AR] [FR]  :

Le gouvernement se compose du Chef du Gouvernement et des ministres, et peut comprendre aussi des Secrétaires d’Etat.

Une loi organique définit, notamment, les règles relatives à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et du statut de ses membres.

Elle détermine également les cas d’incompatibilité avec la fonction gouvernementale, les règles relatives à la limitation du cumul des fonctions, ainsi que celles régissant l’expédition des affaires courantes par le gouvernement dont il a été mis fin aux fonctions.

 

Article 87 initial [AR] :

Le gouvernement se compose du Chef du Gouvernement et des ministres, et peut comprendre aussi des Secrétaires d’Etat.

Une loi organique définit, notamment, les règles relatives à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et du statut de ses membres, des cas d’incompatibilité avec la fonction gouvernementale, les règles relatives à la limitation du cumul des fonctions, ainsi que celles régissant l’expédition des affaires courantes par le gouvernement dont il a été mis fin aux fonctions.

Les membres du gouvernement, ne peuvent, pendant leur mandat de minsitre, exercer aucune activité professionnelle ou commerciale dans le secteur privé. Ils ne peuvent être parti dans les contrats conclus avec l’Etat, avec des entreprises publiques, ou collectivités territoriales, ou des organismes soumis au contrôle financier de l’Etat.

Après tout cela, comment ne pas être dégoûté et boycotter ce référendum?

Pourquoi je rejette le projet de la nouvelle constitution

 

Après 3 mois de travaux, la commission Manouni pour la révision de la constitution au Maroc a remis sa copie. Le discours du roi du 17 juin a annoncé les grandes lignes du projet. Et un référendum sera organisé le 1er juillet, soit 2 semaines à peine après la publication du projet, pour voter pour ou contre ce projet de constitution [FR] [AR]

Que penser de la démarche?

Je reviens tout d’abord au processus d’élaboration de ce projet. Suite aux manifestations du 20 février, les premières contre le pouvoir depuis plusieurs années (pour ne pas dire décennies), le roi a pris les devants dans un discours le 9 mars pour annoncer une révision constitutionnelle. Pour ce, il a nommé une commission composée d’experts technocrates et d’universitaires, chargée d’élaborer un projet de constitution, en consultation avec les partis politiques, centrales syndicales et représentants de la société civile. Tout ce beau monde a remis sa copie avec ses recommandations. La commission a ensuite poursuivi ses travaux à huis-clos sans qu’absolument rien ne filtre de ses travaux, mis à part quelques signaux “positifs” lancés pour calmer les esprits et rassurer sur le bon déroulement. A quelques semaines de la fin de ses travaux, on a vu des partis politiques MENDIER pour avoir à consulter la version finalisée ou quasi-finalisée du projet. RIEN ne filtrait. Les partis se sont donc résignés à découvrir le texte du projet en même temps que le reste des marocains. Ils ont finalement eu accès au document final quelques heures avant le discours royal, sans aucune possibilité de discuter le projet ou de présenter des amendements. Il ont tout simplement été mis devant le fait accompli en écoutant le discours royal. Cette démarche d’élaboration d’un texte aussi fondamental pour une nation, est à mon avis non démocratique. Beaucoup réclamaient à ce qu’une assemblée constituante élue se charge, assistée d’experts, de la rédaction d’une nouvelle constitution pour le Maroc. Les tunisiens s’apprêtent bien à le faire. Et je n’ose même pas mentionner l’exemple des islandais qui discutent de leur projet de constitution sur Facebook…

Que nous propose ce projet?

Je ne suis pas juriste et encore moins constitutionnaliste, mais je me permets, en tant que citoyen qui aspire au développement de son pays, d’avoir un avis sur le projet.

Les avancées :

Nombreuses sont les avancées indéniables dans ce texte. Je ne prétends pas toutes les souligner, mais je citerai celles qui me semblent les plus importantes, et surtout, celles que j’ai comprises 🙂

L’amazigh (Art 5) : Reconnaitre un pan aussi important de l’identité marocaine dans la constitution est un grand pas. Mais il aurait été préférable de l’instituer comme langue nationale plûtot qu’officielle. Ce concept est très difficile à appliquer. Nous avons déjà du mal à l’appliquer correctement à l’arabe (certaines correspondances de l’administration publique sont encore en français, présentations de ministres devant le roi en français…). Par ailleurs, l’amazigh n’est pas standardisé et il est aujourd’hui impossible à deux personnes parlant tarifit et tamazight de se comprendre. Quel amazigh donc choisir comme langue officielle? Je recommande vivement la lecture de l’article d’Ibn Kafka sur le sujet, et auquel j’adhère entièrement.

Dissolution des partis politiques (Art 9) : Seule la justice peut dissoudre un parti. Cela nous éviterait peut-être de revivre le scénario du Badil Al Hadari.

Vote des marocains de l’étranger (Art 17) : Longtemps considérés comme des vaches à lait, pourvoyeur de devises à leur pays, accorder le droit de vote aux MRE est désormais constitutionnalisé. L’expérience avait déjà été menée durant les années 90, mais avait tourné court.

Egalité des sexes (Art 19) : Le projet reconnait l’égalité des sexes dans la société, y compris ceux inclus dans les conventions internationales ratifiées par le Maroc, si celle-ci sont conformes à l’identité marocaine. En gros, on exclut les questions religieuses (héritage notamment).

Législation par dahir (Art 42) : L’exercice législatif par dahir est limité à certains champs. Les autres doivent être contresignés par le chef du gouvernement. C’est donc essentiellement le parlement qui légifère. Des juristes dans le coin pour nous éclairer?

Sacralité du roi (Art 46) : La personne du roi n’est plus sacrée. Sa personne est désormais inviolable, et le respect lui est dû.

Désignation du premier ministre (Art 47) : Appelé désormais Chef du gouvernement, il est choisi parmi le parti politique qui a remporté les élections. Cela aurait par exemple empêché Driss Jettou d’être premier ministre en 2002. L’article est à mon avis mal formulé, car il pourrait y avoir des cas où le parti gagnant des élections (mais sans majorité absolue) serait incapable de réunir une majorité parlementaire.

Interdiction de la transhumance politique (Art 61) : Aucun parlementaire ne peut adhérer à un parti autre que celui sous lequel il a été élu. Il perd son siège sinon. Une telle mesure aurait empêché l’existence d’un groupe parlementaire comme celui du PAM. Le parti n’existait tout simplement pas pendant les élections de 2007, et a réussi quand même à faire migrer des dizaines de parlementaires lors de sa création en 2008…

Immunité parlementaire (Art 64) : L’article délimite expressément l’immunité parlementaire à la seule liberté d’expression ou de vote. Mais cela suffira-t-il pour dissuader les mafiosi de siéger au parlement?

Conflits d’intérêts des ministres (Art 87) : L’article interdit explicitement aux membres du gouvernement d’exercer des activités lucratives dans le secteur privé. Donc à priori, à moins de vendre sa société de distribution de tabac (et bien d’autres), M. Moncef Belkhayat ne devrait plus siéger au gouvernement. Il manquerait à cet article de définir expressément la notion de conflit d’intérêt, notamment ceux impliquant les familles et proches des ministres (Belkhayat et le marché de Bull comme exemple). Article retiré de la dernière version publiée au Bulletin Officiel.

Suppression de la haute cour des ministres (Art 94) : Cette cour fixait des conditions draconiennes pour qu’un ministre soit présenté devant la justice. Les ministres sont désormais des justitiables comme les autres. Reste à savoir ce que dira dans le détail la loi prévue dans ce sens.

Le ministre de la justice ne siège plus dans le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (Art 115) : Une bonne avancée dans l’indépendance (très relative on le verra) du pouvoir judiciaire. On se rappelle comment M. Mohamed Naciri, actuel ministre de la justice s’était acharné contre le juge Hassoun.

Le texte comporte également beaucoup de verbiage sur les principes ô combien nobles des droits de l’homme, de la criminalisation de la torture (coucou DST de Temara), de la mal traitance humaine (Kamal Ammari Allah yrahmou). Le Maroc avait bel et bien légiféré sur tous ces aspects, ratifié beaucoup de traités internationaux, mais ne les a jamais appliqués. Les cas sont très nombreux. Qu’est ce qui obligerait l’exécutif de les appliquer cette fois-ci?

Les grosses insuffisances :

Le fameux Article 19 de l’actuelle constitution : Véritable constitution dans la constitution, beaucoup réclamaient sa suppression. Les pouvoirs qu’ils donnaient au roi semblaient illimités et couvraient de larges prérogatives. Le projet de constitution l’a gardé, en le scindant en 2 articles (41 et 42) en détaillant ces prérogatives. Toutes les attributions du roi de l’actuel article 19, sont maintenues dans ces 2 articles.

Nomination et démission des ministres (Art 47) : On s’attendait à des avancées sur ce point, mais ce ne fut pas le cas. Le roi nomme toujours les ministres sur proposition du premier ministre, comme c’est le cas dans l’actuelle constitution. Or, on sait très bien que dans la pratique (gouvernements Jettou et El Fassi), que la liste des ministres se prépare au sein du cabinet royal, et le premier ministre n’est quasiment pas impliqué dans son élaboration. C’est aussi l’article qui justifie l’existence de ministres de souveraineté sans appartenance politique (5 ou 6 à chaque gouvernement), ou de ministres technocrates affiliés à la va vite dans un parti politique la veille de leur nomination. Les exemples sont nombreux dans l’actuel gouvernement (Belkhayat, Benkhadra, Zenagui, Akhannouch…). Or ces ministres sans couleur politique, ne peuvent en toute logique démocratique être sanctionnés par les urnes. Le deuxième aspect est celui de la démission des ministres. Ces derniers peuvent être démis non par le président du gouvernement, mais uniquement par le roi! Humiliant pour ce président du gouvernement, qui de ce fait n’a pas de véritable autorité sur ses ministres. De plus, c’est une manière de protéger les ministres de “souveraineté” qui, même s’ils ne se conforment pas à la politique du gouvernement, ne peuvent être démis que par le roi.

Nomination des walis, gouverneurs, ambassadeurs, responsables de la sécurité intérieur et dirigeants des entreprises publiques stratégiques (Art 49) : Bien que ces hauts fonctionnaires font partie de la fonction publique, mise sous autorité du président du gouvernement, leur nomination est effectuée dans le conseil des ministres présidé par le roi. Or, compte tenu du déséquilibres du pouvoir, on peut très bien s’attendre à ce que ces nominations viennent directement du cabinet royal. Le président du gouvernement ne pourra qu’obtempérer. Or, ces walis et gouverneurs sont selon l’article 145 du projet, des représentants du “pouvoir central. Au nom du gouvernement, ils assurent l’application des lois, mettent en Œuvre les règlements et les décisions gouvernementales et exercent le contrôle administratif.” Comment peuvent-il rendre compte au chef du gouvernement alors que c’est un conseil présidé par le roi qui les a nommés? La même logique s’applique aux dirigeants des entreprises publiques stratégiques, qui sont censés se conformer à la politique générale du gouvernement.

Nomination des membres du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (Art 113) : Organe suprême de la magistrature, il se devait d’être complètement indépendant de l’exécutif. Or, seule la moitié de ses membres est élue par les juges. L’autre moitié est soit désignée directement par le roi, soit constituée de membres de droit (président du CCDH, médiateur, procureur général du roi auprès de la cour de cassation…), eux même désignés par le roi. L’indépendance de la justice, je la cherche encore…

Nomination de la Cour Constitutionnelle (Art 130) : La Cour constitutionnelle exerce, entre autres, le contrôle sur la constitutionnalité des textes adoptés dans le pays, ainsi que la validation des résultats des élections et des référendum. Or, la moitié de ses membres, y compris son président, sont directement nommés par le roi. Comment peut-on dans ce cas garantir son indépendance et son impartialité?

Pour se donner une idée plus globale des pouvoir du roi dans ce projet de constitution, je vous propose de jeter un coup d’oeil à ce graphe :

Réalisé par Reda Chraibi

Avec tous ces pouvoirs accordés au roi, peut-on dire que le Maroc sera une monarchie parlementaire? Absolument pas! Bien que l’article 1 stipule que “Le Maroc est une monarchie constitutionnelle, démocratique, parlementaire et sociale”, il s’agit à mon sens d’un verbiage inutile, et d’une superposition d’adjectifs contradictoires (constitutionnelle vs parlementaire).

Ce projet de constitution consacre-t-il le chef du gouvernement, issu des urnes, comme un véritable chef de l’exécutif? Absolument pas. Il est réduit à un exécutant sous tutelle obligé de faire valider ses décisions les plus importantes par le roi. Connaissant le déséquilibre des pouvoirs dans la réalité, on peut difficilement voir un chef du gouvernement s’opposer au roi.

Pour être plus concret, ce projet de constitution empêchera-t-il des bêtises comme le projet du TGV de voir le jour? Non. Obligera-t-il TOUS les ministres à rendre compte de leurs actions devant les marocains, au cours d’élections? Non. Empêchera-t-il l’entourage royal (à leur tête MM. El Himma et Majidi) d’intervenir à tout va dans les affaires du pays, sans aucun contrôle des instances élues par le peuple? Non. Rendra-il la justice plus indépendante de l’exécutif? Non.

La définition même de la démocratie est de pouvoir juger ceux qui nous gouvernement et de leur demander des comptes. Ce projet ne permet pas de le faire puisque celui qui détient le pouvoir exécutif, à savoir le roi, ne peut pas rendre de comptes.

Je ne veux pas demander des comptes à mon roi. Je veux qu’il reste au dessus de la mêlée. Un symbole de la nation. Un arbitre auquel on a recours quand il n’y en a plus d’autres. Ce n’est malheureusement pas le cas dans ce projet de constitution.

Ceux qui disent aujourd’hui que ce projet est une étape vers cet idéal ne connaissent pas l’histoire du Maroc. Le mouvement national avait déjà formulé ces demandes de roi qui règne mais ne gouverne pas pour la constitution de 1962. On leur avait répondu qu’il était encore trop tôt pour cela. 50 ans après, on attend toujours. Entre temps, des pays se démocratisent, se développent, progressent. La mondialisation fait que le monde ressemble à des parts de marché à conquérir, à des avantages concurrentiels à acquérir. Tout retard dans le développement peut être fatal pour un pays, et très difficilement rattrapable par la suite. Le Maroc et la Corée du Sud étaient au même niveau de développement durant les années 50 (même taux d’analphabétisme, PIB/habitant identiques…). On connait la suite.

Toutes ces raisons me poussent à rejeter ce projet de constitution. Je ne sais pas encore si je voterai non, ou que je boycotterai le scrutin, mais ce ne sera certainement pas un oui.

Liens :

Pourquoi les marocains continuent-ils à manifester?

La vidéo de mon intervention sur l’émission Aswat Shabaka de France 24 Arabic. J’y explique brièvement les objectifs du mouvement du 20 février, et la raison pour laquelle les marocains continuent de manifester, malgré l’annonce de plusieurs réformes.

 

PS : L’émission a été enregistrée 3 jours avant les attentats odieux de Marrakech.
PPS : La qualité de vidéo est mauvaise malgré l’utilisation d’une connexion Menara ADSL de 4 Mbps/s. Cela vous donne une idée sur la qualité de service chez Maroc Telecom…

Maroc Telecom : une des marges les plus confortables au Monde?

 

Les marocains n’en finissent plus de se plaindre de leurs opérateurs de télécommunications. Un appel a été publié par des blogs marocains appelant à une meilleure qualité de service et à des prix plus abordables pour les marocains. Les débits Internet (mobile 3G surtout) deviennent ridicules, les bridages ne se comptent plus, et la couverture comporte de plus en plus de zones d’ombre à travers le pays. Le consommateur se sent lésé face à un régulateur quasi-absent et un sentiment d’entente sur les prix. Un argument qui revient souvent, est celui de l’importance des investissements consentis par les opérateurs. Il se doivent d’appliquer un certain niveau de prix pour assurer une rentabilité financière qui garantirait la pérennité du service. Soit. Penchons nous alors sur le cas de l’opérateur historique.

Maroc Telecom réalise depuis quelques années des résultats remarquables. Un chiffre d’affaires de 31,7 milliards de DH pour un résultat net 9,5 milliards de DH, entièrement distribué aux actionnaires. Soit un résultat net supérieur à celui de toutes les banques marocaines cotées réunies!

Il existe un indicateur financier très simple à utiliser appelé “Marge nette”. Il est égal au résultat net divisé par le chiffre d’affaires. En gros, cet indicateur mesure quel est le résultat net que l’entreprise réalise en moyenne à chaque fois qu’elle vend un produit ou un service pour 100 DH. Qu’en est-il de Maroc Telecom?

La marge nette de l’opérateur historique s’est élevée à 30%! En gros, quand vous rechargez votre mobile, ou payez votre facture Internet de 100 DH, 30 DH sont un bénéfice net de l’opérateur, après avoir payé toutes ses charges, amorti ses investissements, et payé ses impôts! Cette marge astronomique n’est pratiquement atteinte nulle part ailleurs dans le monde! Examinons les chiffres du tableau ci-dessous :

Quand on lit les chiffres, on se rend compte que même les plus gros opérateurs historiques européens restent dans des marges nettes très raisonnables. Celles de Deutsche Telecom, Telefonica ou France Telecom oscillent entre  4 et 17%. Dans les pays arabes, les marges sont nettement plus élevées, mais seul Telecom Egypt réussit l’exploit de dépasser (d’un petit point) notre Maroc Telecom national.

A qui profite cette situation, et qui en est responsable? L’Etat ne semble pas s’en plaindre. Maroc Telecom lui verse de généreux dividendes (2,85 milliards de DH) et des rentrées d’impôts astronomiques (à peu près 5 milliards de DH en 2010). Les autres opérateurs non plus. L’ANRT semble vouloir maintenir un niveau élevé des prix sur le marché, pour préserver la santé financière des deux autres opérateurs, Méditel et Inwi.

Qui en souffre? Le consommateur, cela va de soi. Et la balance des paiements du Maroc. Celle-ci est en net déficit depuis quelques années, et les choses ne devraient pas s’arranger. Les sorties en dividendes restent très importantes. C’est le prix à payer pour des investissements étrangers nous dit-on. Mais ce qu’on nous dit moins, c’est qu’il existe des moyens fiscaux pour limiter ces sorties de devises sous forme de dividendes. En imposant ces derniers, ou en instaurant des mesures fiscales favorisant le réinvestissement des bénéfices.

Mais en attendant, Vivendi remercie chaleureusement tous les marocains qui ont contribué à réaliser les bénéfices de sa filiale la plus rentable au Monde!

Agit-on vraiment pour combattre la corruption au Maroc?

Parmi les revendications du mouvement du 20 février, la lutte contre la corruption au Maroc figure en bonne place. Le pays gangréné par la corruption à tous les niveaux, du plus haut fonctionnaire au chaouch de service, fait figure de cancre quand il s’agit de classements internationaux dans le domaine. Ainsi, il est passé du 52e rang en 2002 au 85e en 2010 dans l’Indice de Perception de la Corruption élaboré par Transaprency International. Preuve s’il en est besoin, que la multitude de commissions et d’instances mises en place par les différents gouvernements depuis une décennie n’ont servi à rien, ou pas grand chose… Le citoyen lambda ne perçoit aucun changement dans les pratiques, voire une situation qui empire.

Des mesures parfois très simples peuvent changer les choses. Une des premières causes de la corruption, et le manque d’information du citoyen. Pourquoi ne pas améliorer l’accès à l’information, expliquer les procédures administratives, clarifier aux citoyens leurs droits… Des portails Internet existent certes, mais la communication via des posters et des affiches dans les administrations est quasi-absente.

Autre point : la dénonciation. La loi marocaine actuelle ne protège pas les dénonciateurs de faits de corruption. Un dénonciateur peut facilement être considéré comme complice, et donc passible de poursuites judiciaires. L’Instance Centrale de Prévention de la Corruption (ICPC) n’a cessé de demander la protection légale des dénonciateurs. Aucune loi n’existe jusqu’aujourd’hui dans ce sens. Une petite expérience a néanmoins été lancée par l’ICPC , mais qui ne concerne aujourd’hui que les dénonciations “dans le cadre de marchés publics ou d’opérations d’investissement relatifs aux Petites et Moyennes Entreprises (PME)”. Sauf que l’ICPC ne jouit d’aucun pouvoir qui lui permet de saisir la justice en cas de dénonciation. Grosse lacune institutionnelle donc.

Ceci concernait la corruption “subie” par les citoyens. Qu’en est-il de la corruption “voulue”? Soudoyer un fonctionnaire pour fermer les yeux sur un plan de construction non conforme ou un policier/gendarme pour une infraction au code de la route reste très commun. Et là, il ne faut plus compter sur la dénonciation. C’est là que le contrôle judiciaire et administratif doit intervenir. Déclarations du patrimoine et inspections doivent être la règle dans un pays qui se veut démocratique et transparent. Mais c’est encore loin d’être le cas au Maroc. L’impunité reste la règle, même dans le cas de graves dysfonctionnements, comme ceux établis par la Cour des Comptes par exemple. Autre exemple : malgré l’obligation dans le nouveau code de la route du port d’un badge identifiant, on ne voit plus aucun agent de l’ordre (policier ou gendarme) porter son badge. N’est-ce pas un signe d’impunité ostentatoire?

Pourquoi nos gouvernants ne s’inspirent-ils pas d’autres pays qui ont eu quelques succès dans la lutte contre la corruption? En Inde par exemple, il existe un portail “I paid a bribe” qui collecte les plaintes des citoyens ayant été obligés de payer un pot de vin pour accéder à un service public. Lors d’un récent voyage en Tanzanie, j’ai pu voir ces pancartes un peu partout dans les lieux publics invitant à dénoncer les actes de corruption commis par les fonctionnaires publics :

Que perd-t-on à installer ce type de pancartes dans les arrondissements administratifs, les commissariats et les hôpitaux? Rien. Absolument rien. Combien de temps faudra-t-il pour instaurer une loi qui protège les dénonciateurs? On l’attend depuis au moins 10 ans. La loi anti-terrorisme a bien été approuvée en 10 jours, non? Que fait la justice pour poursuivre les corrompus parmi les hauts fonctionnaires de l’État? Est-elle trop occupée à juger les dénonciateurs des complices de trafiquants de drogue à Nador?

Quand on voit ce qu’on voit, que l’on entend ce qu’on entend et que l’on sait ce que qu’on sait, on a raison de penser ce qu’on pense. Que l’État n’a aucune envie de combattre la corruption, et que certains ont tout intérêt à que cela perdure…

Manifestations du 20 mars au Maroc : quelles leçons? (+ Photos)

Après des manifestations à succès le 20 février, les marocains sont à nouveau sortis dans les rues ce 20 mars 2011. Les manifestations se sont globalement bien déroulées, malgré des craintes de répression policière sauvage après celle du 13 mars à Casablanca. Les forces publiques sont restées finalement quasi-invisibles se contentant de suivre la marche de loin.

Mais que pouvaient demander ces manifestants après le discours royal du 9 mars? Le roi n’a-t-il pas annoncé des réformes constitutionnelles, conformément aux demandes des manifestants du 20 février?

Le discours a certes été globalement positif, mais la manière de réformer ne correspondait pas à ce qu’attendent une bonne partie des marocains. Plutôt que d’appeler à l’élection d’une assemblée constituante (comme cela se fera en Tunisie et comme ça s’est fait en Islande), puis de soumettre le texte à un référendum, le roi a préféré nommer une commission chargée de réformer la constitution, puis de la soumettre au référendum. Cette méthode ne garantit absolument pas que les revendications du peuple marocains seront prises en compte, et connaissant la machine médiatique et sécuritaire du makhzen, il ne fait aucun doute que cette constitution sera adoptée à plus de 90%… En 55 ans d’histoire indépendante du Maroc, aucune constitution n’a été adoptée à un niveau inférieur…

Le reste des revendications du mouvement du 20 février porte sur l’indépendance de la justice (le roi préside toujours le conseil suprême de la magistrature), la séparation entre le pouvoir et les affaires (le mastodonte SNI garde toujours la main sur d’importants pans de l’économie marocaine), l’instauration d’une vraie culture contre l’impunité des dirigeants du secteur public, la libération de tous les détenus politiques, une plus grande liberté de presse et un service public médiatique plus ouvert à la diversité politique et sociale.

D’autres revendications à caractère social sont évoquées par le mouvement du 20 février (emploi, santé, éducation, logement, vie chère…). Mais à mon humble avis, le jour où on aura un gouvernement issu de la vraie volonté populaire, qui rend des comptes devant le peuple, et où sont représentés les meilleurs compétences que compte le pays, ces questions sociales seront naturellement adressées.

Quand on voit que les quelques manifestations du 20 février ont déclenché énormément de réactions en si peu de temps, cela nous incite à continuer la mobilisation pour maintenir le momentum.

Mais s’il y a une chose dont on peut déjà se réjouir, c’est le regain d’intérêt des marocains pour la politique. On peut déjà s’attendre à des taux de participation élevés lors des prochaines élections, loin des ridicules 20-30% des élections de 2007. Reste aux partis politiques de mieux répondre aux attentes des marocains, et à être plus proche des citoyens et de leur revendications. C’est leur rôle, et il semble qu’ils n’ont pas tous reçu le message.

Pour finir, ce qui m’a le plus frappé dans ces manifestations du 20 février et 20 mars, c’est que c’est la première fois pour des gens de ma génération (j’ai 26 ans) qu’on sort aussi massivement manifester pour notre pays. Nous qui n’avions l’habitude que de sortir pour les autres. Palestine pendant la 2ème intifada, Iraq lors de l’invasion américaine. Il était temps qu’on exprime notre mécontentement par rapport à ce qui se passe au Maroc.

Photos disponibles sur demande / Photos available on request

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Faut-il dissoudre le PAM?


Après en avoir fini avec Ben Ali, les tunisiens se sont vite rendus compte qu’il fallait très vite en finir avec son système, au risque de voir le pays retomber dans le chaos. Et une des premières décisions prises par le très populaire ministre tunisien de l’intérieur, Farhat Rajhi, fut la dissolution du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD), véritable Etat dans l’Etat, accusé de semer la terreur en Tunisie, en finançant des émeutes un peu partout dans le pays. Histoire de rappeler que Ben Ali était garant de la sécurité et de la stabilité de la Tunisie…

Contrairement à ce que l’on peut croire, cette pratique est loin d’être inédite au Maroc. En février 2008, le premier ministre a décidé de dissoudre le parti “Al Badil al Hadari” compte tenus d’éventuels liens avec l’obscur réseau Bellirej. L’article 57 de la loi relative aux partis politiques au Maroc le permet sous certaines conditions :

” Sera dissous, par décret motivé, tout parti politique qui inciterait à des manifestations armées dans la rue, ou qui présenterait, par sa forme et son organisation militaire ou paramilitaire, le caractère de groupes de combat ou de milices privées ou qui aurait pour but de s’emparer du pouvoir par la force, de porter atteinte à la religion islamique, au régime monarchique ou à l’intégrité territoriale du Royaume.”

Qu’en est-il de notre RCD marocain? Le PAM, qui a moins de 4 ans d’existence, n’a pas fini de faire du bruit autour de lui. A force de s’attirer tout ce que compte le pays comme opportunistes et arrivistes, les dérapages ne se comptent plus.

Le plus flagrant reste à ce jour l‘implication de certains ténors du PAM dans l’organisation du campement de Gdim Izim. Le parti d’El Himma, cherche depuis un moment à s’implanter dans les provinces sahariennes, et de bousculer les bases plutôt solides de l’Istiqlal. Pour ce faire, il a travaillé en très étroite collaboration avec l’ex-wali Jelmous, pour mettre le bâton dans les roues des actions de l’Istiqlal, notamment en bloquant des projets de notables istiqlaliens. Le pas suivant a été de laisser apparaitre la colère et les revendications populaires en permettant l’installation d’un campement à quelques kilomètres de Laâyoune, alors que de pareilles manifestations sont strictement surveillées dans une zone aussi sensible. Les cadres du PAM, ont ensuite participé aux négociations aux cotés des autorités locales pour paraitre comme des “sauveurs” et se construire une base électorale pour les prochaines élections. La suite on la connait : les séparatistes infiltrés ont fait régner la terreur parmi ceux qui voulaient quitter le camp, causant la mort de 11 membres des forces de l’ordre, une image catastrophique du Maroc dans les médias internationaux, une récupération politique des séparatistes, ainsi qu’une sévère condamnation du Maroc au Parlement européen. C’est ce qu’on appelle jouer avec le feu. Le PAM a osé porter atteinte à une cause nationale, pour des objectifs purement électoralistes. Et personne n’a osé bouger le petit doigt pour le sanctionner.

Dernier épisode à Salé, un élu PJD, Jamâa Mouatassim, est visé pour une plainte pour une étrange affaire d’abus de pouvoir et de détournement de fonds. L’homme jugé très intègre par ses partisans, semble faire les frais du souhait du PAM d’écarter (par tous les moyens) le PJD de la gestion des affaires locales dans les principaux conseils municipaux au Maroc. L’histoire avait commencé à Oujda, semble en cours à Salé, et devrait bientôt s’étendre à Rabat et Casablanca. Et dans le cas de Mouatassim, c’est l’appareil judiciaire, Ô combien indépendant de l’exécutif et des sphères du pouvoir, qui semble instrumentalisé.

Comment garantir qu’un parti fondé par un ami très proche du roi, puisse respecter les règles du jeu démocratique? Comment espérer que certains membres du parti n’utilisent pas cette proximité comme arme électorale? On a peut-être déjà oublié que des candidats PAM lançaient aux électeurs (ruraux essentiellement) une phrase magique pendant les campagnes électorales : “Si vous êtes pour le roi, il faut voter PAM. Sinon vous êtes contre le roi.”

Garantir que cela ne se reproduise plus suppose une seule action : dissoudre le PAM.

Révolution tunsienne : Et le Maroc dans tout cela?

Le dictateur est tombé. La Tunisie respire et savoure sa révolution des jasmins construite sur le sang de dizaines de martyrs. Jamais un état arabe ne s’était débarrassé de la sorte de son dictateur. Seuls la Faucheuse, un putsch ou une invasion étrangère pouvaient les écarter de leurs confortables fauteuils.

Tirer à balles réelles sur les manifestants aura été la goute qui a fait débordé le vase des tunisiens. Ils n’en pouvaient plus de ce régime mafieux, oppressant et sanguinaire. Et le soutien de l’armée fut crucial dans ce combat. Fidèle à un principe de non-ingérence qui datait de l’ère Bourguiba, elle a obligé Ben Ali à fuir pour éviter un bain de sang. A noter que l’armée tunisienne ne dispose que de 35 000 hommes contre 120 000 hommes pour la police! C’est dire le degré de “policiarisation” du pays!

Maintenant, la question que se posent beaucoup : est-ce que cette révolution sera contagieuse?

Quoique disent les dirigeants arabes et leurs agences de presse, aucun régime arabe n’est considéré par les standards internationaux comme démocratique, ni même hybride. Ils sont tous classifiés comme autoritaires, doux euphémisme dont héritent également certaines dictatures sanguinaires.

Mais les conditions sont loin d’être les mêmes pour tous les pays. Si dans une très grande majorité, le pouvoir est soutenu par l’armée, des subtilités existent. Certains prétextent un état d’urgence instauré depuis les premières guerres contre Israël, d’autres invoquent les spécificités religieuses et culturelles de leurs peuples, sans oublier ceux qui prétendent avoir dépassé le stade de la démocratie et avoir atteint la perfection en terme de gouvernance (se référer au chapitre correspondant dans le Livre Vert).

Qu’en est-il au Maroc? Peut-on s’attendre à des évènements similaires?

Mis à part chez d’irréductibles 9% nihilistes, la monarchie marocaine reste très populaire. Le fameux sondage du Monde/Telquel l’avait bien confirmé à ceux qui en doutaient encore.

La situation économique est par contre assez similaire. Dépourvus de richesses pétrolières, les deux pays comptent beaucoup sur le tourisme ainsi que l’industrie et services tournés vers l’export comme importants générateurs d’emploi et de rentrées en devises. La crise mondiale a eu des effets négatifs sur les carnets de commande et du coup sur l’emploi, surtout dans le secteur du textile. Par ailleurs, les taux de chômage des jeunes reste très important, à une différence près pour la Tunisie qui “produit” plus de diplômés de l’enseignement supérieur (comparés à la population totale).

Les Trabelsi/Ben Ali avaient constitué un clan tentaculaire qui a pris le contrôle d’une très grande partie de l’économie tunisienne. On retrouvait leurs traces dans tous les secteurs (les plus juteux surtout), et n’hésitaient pas à mettre à genou leurs concurrents sans se soucier d’aucune règle de droit. Beaucoup de chefs d’entreprises tunisiens préféraient garder des parts de marché modestes dans leurs secteurs, et faire profil bas, plutôt que de devenir trop voyants et de susciter des convoitises inutiles de la part du clan régnant.

Au Maroc, il existe un terme pour définir cette sphère économique qui bénéficie des faveurs et de la proximité avec le pouvoir : le “Makhzen économique”. On est certes loin de l’hégémonie des Trabelsi/Ben Ali, mais certains secteurs sont loin d’être tout à fait concurrentiels. Prenez par exemple celui du sucre, de l’huile, ou de la grande distribution. Et les faveurs du pouvoir ne manquent pas pour certains acteurs de l’immobilier, de la finance, de l’agriculture, voire même des panneaux publicitaires!

Les investisseurs étrangers souhaitant s’installer au Maroc s’en plaignaient souvent et déchantaient très vite à l’idée d’investir dans des secteurs “pas très fair”. La fusion ONA/SNI et son intention de réduire ses participations dans ses filiales agro-alimentaires vient sans doute après des pressions européennes dans le cadre de l’accord du Statut Avancé entre le Maroc et l’Union Européenne.

Et le PAM dans tout cela? Peut-on vraiment comparer le RCD tunisien à notre PAM national? Si la proximité au pouvoir est commune aux deux, les schémas sont totalement différents. D’un coté nous avons un parti quasi-unique baignant aux cotés d’une opposition fantoche, et d’un autre, un parti makhzanéen dont la création remonte à 3 ans, qui rafle tout ce que le pays compte comme opportunistes et qui a pour principal but d’affaiblir les autres formations politiques et de servir les intérêts obscurs du Makhzen. Celui-ci devrait être conscient que le rôle d’un parti politique est surtout d’encadrer les citoyens et de porter leurs revendications. Créez le vide politique, et ces revendications finiront par s’exprimer dans la rue, avec tout le risque de violences que cela peut engendrer.

Sur le plan de la liberté d’expression, la différence reste tout de même notable. Si la presse et les médias étaient complètement muselés et Internet largement censuré en Tunisie, une certaine marge de manœuvre existe au Maroc. Mais avec la fermeture de plusieurs journaux et magazines, et les condamnations lourdes de journalistes, ces libertés sont entrain de reculer sérieusement.

On n’a peut-être pas besoin d’une révolution au Maroc, mais on a besoin d’une très sérieuse remise en question de tout ce qui a été fait durant les dix dernières années dans le pays. Des réorientations politiques et des réformes constitutionnelles sont nécessaires pour corriger le tir. Et qu’on arrête de nous dire qu’il faut arbitrer entre respect des libertés et prospérité économique. L’un ne peut marcher sans l’autre. La Tunisie en est aujourd’hui la preuve.

Quelques liens :

Comparatif des tarifs GSM au Maroc : Inwi, Méditel et Maroc Telecom – Novembre 2010

Après avoir passé quelques mois à observer le comportement du nouvel entrant sur le marché GSM, IAM et Méditel sont passés à l’offensive en réduisant significativement leurs tarifs, et rendant leur lecture beaucoup plus simple. Ils répondent ainsi à une forte attente des consommateurs qui cherche à communiquer moins cher, tout en ayant de la visibilité sur ce qu’ils paye vraiment.

Cette offensive d’IAM et de Méditel s’explique également par l’effritement de leurs parts de marché au profit d’Inwi. Selon les derniers chiffres de l’ANRT, Inwi est passé à plus de 10% de parts de marché, en moins d’un an d’existence! Mais à y regarder de plus près, l’explication est ailleurs. Avec un taux de pénétration qui avoisine les 97%, il ne faut surtout pas croire que 97% des habitants sont équipés d’un téléphone portable. Le dénominateur du ratio étant le nombre d’habitants au Maroc, le chiffre inclut donc des bébés, des enfants, des personnes vivant dans des zones non couvertes… Cela peut s’expliquer uniquement par un taux multi-équipement de plus en plus élevé. Les opérateurs sont parfaitement conscients que beaucoup de consommateurs utilisent plusieurs cartes SIM à la fois, afin de bénéficier des tarifs les plus avantageux, en fonction de l’opérateur de la personne appelée. Et c’est justement une des raisons qui a sans doute poussé IAM et Méditel à unifier leurs tarifs, quelque soit l’opérateur, en espérant regagner des parts de marché dans les mois à venir.

IAM et Méditel se sont donc alignés sur Inwi en offrant un tarif unique vers tous les opérateurs à toute heure de la journée. Ce tarif est actuellement de 3,6 DH / minute pour les deux opérateurs. Par contre, ils continuent à facturer suivant une première minute indivisible, puis des paliers de 20 secondes pour IAM et de 30 secondes pour Méditel.

Résultat, il devient encore plus difficile de comparer les prix, tant les prix sont proches. Le graphe et le tableau suivant peuvent en témoigner  :

Corriger les prix des communications par l’effet des doubles recharges n’est pas vraiment utile pour cette fois. Inwi s’y est mis aussi, et il suffit de diviser les prix par deux pour obtenir le prix réel des communications. De plus, les opérateurs misent sur des offres ponctuelles, mais de moins en moins compréhensibles par les consommateurs (double recharge avec bonus, minutes de bonus le soir…), ce qui rend la comparaison en incluant cet effet encore plus difficile.

Quel est donc l’opérateur le moins cher en prépayé? Tout dépend de votre profil de consommateur. Si vous n’appeler que pour des durées généralement courtes (moins d’une minute), Inwi devrait vous convenir parfaitement, à condition que vous soyez satisfaits de la qualité du réseau. Mais si vous appelez pour des durées plus longues, optez plutôt pour IAM ou Méditel, avec un avantage pour ce dernier qui propose des formules assez innovantes pour les personnes qui préfèrent appeler en journée, en soirée, ou pendant des durées assez longues.

Aura-t-on droit à de nouvelles baisses dans un futur proche? Il semble bien que non. Bien que les tarifs d’interconnexion entre opérateurs devraient baisser petit à petit d’ici 2013, une nouvelle baisse n’est pas acquise. Mais seul l’avenir nous dira comment les opérateurs réagiraient si la baisse des parts de marché de IAM et de Méditel se confirme.

Message de service aux employés d’Inwi : Merci de plus poster de commentaires en vous faisant passer pour de simples consommateurs.

Petite image en bonus d’une antenne GSM sous forme d’un palmier à Marrakech!


Sahara marocain, ce paradis fiscal…

En établissant la liste des paradis fiscaux dans le Monde, l’OCDE n’avait sans doute pas à l’esprit qu’il existe un territoire aux portes de l’Europe qui n’impose aucune taxe à ses habitants!

Après le retour en 1975 des provinces sahariennes au Maroc, le gouvernement avait établi un certain nombre de mesures pour favoriser l’essor et le développement économique de ces provinces. Ainsi, des investissements massifs en infrastructure ont été réalisés (routes, usines de dessalement d’eau de mer, raccordement au réseau électrique national, ports, aéroports…), et d’importantes mesures fiscales ont été prises pour favoriser l’entrepreneuriat, et encourager les fonctionnaires de l’état marocain à s’installer loin de leurs villes natales.

Ainsi, les provinces sahariennes sont tout simplement exonérées de toute taxe :

  • Impôt sur la société (IS) : 0% (30% ailleurs)
  • Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) : 0% (20% ailleurs)
  • Impôt sur le revenu (IR) : 0% (Impôt par tranches ailleurs)
  • Taxe intérieure de consommation (TIC) : 0% (Impôt qui touche surtout les produits pétroliers, les boissons gazeuses et alcoolisées)

Même l’état américain du Delaware, pourtant réputé comme un des plus grands paradis fiscaux au Monde, ne fait pas mieux!

Pas étonnant que de plus en plus de sociétés marocaines soient domiciliées à Laayoune, alors que l’essentiel de leur activité est basé à Casablanca ou Tanger…

Un des problèmes qui ont causé les derniers évènements de Laayoune, est justement la dépendance des habitants des aides de l’Etat marocain. Pour des raisons politiques évidentes, l’Etat a développé une culture de l’assistanat, en distribuant des “cartiya” de l’Entraide Nationale donnant droit à 1350 DH/mois, aux transports gratuits, et à la distribution gratuite de denrées alimentaires. Or, ces cartes ont été distribuées selon des critères loin d’être équitables, et ne vont pas forcément aux plus nécessiteux… Et cela crée forcément des situations comme celles qu’a connu le camp de Gdeim Izik ces dernières semaines.

Et pour tous ceux, qui accusent l’Etat marocain de “piller” les ressources en phosphates des provinces sahariennes, M. Terrab, PDG de l’OCP a apporté une réponse très claire sur le sujet dans une déclaration à Reuters :

OCP has faced criticism from some foreign civil society groups over it operations in Western Sahara, an area about the size of Britain that was annexed by Morocco in 1975 and is the subject of Africa’s longest-running territorial conflict.

Critics say the firm should not be exploiting Western Sahara’s mineral resources until the sovereignty issue is settled. Terrab rejected that, saying his firm was not in Western Sahara to pursue profits.

Company officials say the territory has less than 2 percent of Morocco’s phosphate reserves, and that between 1976 and 2008 the firm made net losses there of 4.716 billion Moroccan dirhams, or about $580 million at the current exchange rate.

“If we stopped that operation, we could probably stop our losses at the same time but you would have 1700 families that would lose their livelihood,” Terrab said. “So we see it as the opposite, we see it as our moral duty to be there.”

En gros, l’OCP perd beaucoup d’argent en exploitant les mines de Boukraa, et qu’elle le fait surtout pour créer des emplois et un tissu économique et industriel dans la région.

Voici le genre de réponses intelligentes qu’on devrait entendre plus souvent, au lieu des stupides et débiles communiqués de la MAP.

Pour une vision globale du sujet, lire l’excellent dossier de Telquel, “Ce que nous coûte le Sahara“.