Covid-19 : L’application de tracking des marocains doit être open source

Le gouvernement marocain a lancé le développement d’une application mobile permettant le traçage des contaminations du Covid-19. Elle permettra de tracer les contacts physiques de tous ceux qui l’auront installée (en utilisant le GPS et/ou le Bluetooth), et d’avertir tous ces contacts en cas de contamination de l’un d’entre eux par le Covid-19. Couplée au testing massif, cette application pourrait être un moyen efficace pour lutter contre cette pandémie à l’échelle nationale, et d’identifier très rapidement tout foyer, d’autant plus que, selon l’ANRT, 75% des marocains disposent d’un smartphone.


D’autres pays comme Singapour, la Corée du Sud, la Chine, le Ghana, la République Tchèque l’ont fait. Celle du Royaume-Uni est en cours de développement. Idem pour la France où l’INRIA pilote le projet, et où un débat parlementaire devrait s’ouvrir incessamment pour discuter des répercussions lourdes de ce type d’applications sur les libertés individuelles et la protection des données personnelles.

Au Maroc, ce type de débat ne semble pas d’actualité aujourd’hui, ce qui est une aberration totale. L’Etat marocain ne jouit pas des meilleures réputations en termes de protection des données personnelles et des libertés individuelles. Mais d’après le document de référence publié par plusieurs supports de presse, le traitement des données devra se faire sur le téléphone lui même, et non sur un serveur distant. La seule garantie de non utilisation de ces données à des fins autres que celles de traçage des contaminations du Covid-19, serait de publier l’intégralité du code source de l’application développée. Une fois ce code source ouvert, il pourra être audité par des experts informatiques pour s’assurer des protections adéquates des donnés personnelles collectées.

D’autres pays ayant recours à ce type d’applications en ont déjà publié le code source, afin justement, de rassurer leur population sur l’utilisation de leurs données personnelles (Singapour, Israel, République Tchèque…). Résultat : des millions d’utilisateurs ont adhéré à la démarche et ont installé l’application afin de contenir le virus.

Encore une fois, ne ratons pas l’occasion de redonner confiance aux citoyens dans leur État. Ce serait dommage que la majorité des marocains renoncent à installer ce type d’applications par méfiance. Car sans adhésion massive de la population à ce type d’initiatives, elles seront tout simplement inutiles.

Cette tribune a été publiée sur Medias24

Etat marocain : des méthodes kadhafistes pour surveiller Internet ?

Rappelez-vous, d’un épisode particulier de la chute du sanguinaire dictateur libyen : deux journalistes du Wall Street Journal (WSJ) découvrent stupéfaits l’existence d’un centre secret à Tripoli pour la surveillance d’activistes libyens sur Internet. Le centre disposait d’importants moyens informatiques dont un logiciel appelé Eagle et édité par la société française Amesys.

Que permet de faire ce logiciel ? Le manuel d’utilisation de Eagle est on ne peut plus clair :

« Le système récupèrera toutes les données, et fichiers attachés, associés aux protocoles suivants : Mail (SMTP, POP3, IMAP), Webmails (Yahoo! Mail Classic & Yahoo! Mail v2, Hotmail v1 & v2, Gmail), VoIP (SIP / RTP audio conversation, MGCP audio conversation, H.323 audio conversation), Chat (MSN Chat, Yahoo! Chat, AOL Chat, Paltalk -qui permet aux utilisateurs de Windows de chatter en mode texte, voix ou vidéo-, Http, Moteurs de recherche (Google, MSN Search, Yahoo), Transferts (FTP, Telnet) ».

Amesys Eagle Operator Manual Copy by rewriting

Il s’agit en gros d’un logiciel de « Deep Packet Inspection », capable de récupérer et inspecter des données circulant entre libyens, et même de dresser des cartographies de relations en fonction des personnes contactées et de la fréquence des échanges.

L’enquête du WSJ avait bien révélé que les services libyens avaient utilisé le logiciel pour épier des conversations entre activistes sur Yahoo Chat et via email.

Le gouvernement marocain est-il tenté d’utiliser des méthodes du défunt Kadhafi pour surveiller Internet ? Tout porte à le croire malheureusement.

Le «Canard enchainé» français avait publié en Février 2012 une facture de 2 millions de dollars destinée au gouvernement marocain de la part de la société Serviware, filiale d’Amesys, elle-même filiale du groupe Bull.

La facture porte mention du « Projet Popcorn », mais ne donne pas plus de détails sur la consistance de la commande. Mais selon le « Canard Enchaîné », le même logiciel aurait été fourni au Qatar et à… la Syrie ! C’est dire la nature démocratique des régimes clients d’Amesys.

Si aucune réaction officielle des autorités marocaines n’a été enregistrée, il ne serait pas du tout étonnant que le régime marocain se mette à surveiller ceux qui l’enquiquinaient il y a 2 ans avec les manifestations du mouvement du 20 février, et le vent de liberté d’expression qui souffle sur l’Internet marocain depuis.

Mais ne faudrait-il pas rappeler que l’article 24 de la Constitution marocaine stipule explicitement que

« Toute personne a droit à la protection de sa vie privée. (…) Les communications privées, sous quelque forme que ce soit, sont secrètes. »

Le régime se cache malheureusement très souvent derrière le prétexte de lutte contre le terrorisme et de lutte contre les fraudes pour justifier ces pratiques. Sauf que ce même article de la Constitution stipule que

« Seule la justice peut autoriser, dans les conditions et selon les formes prévues par la loi, l’accès à leur contenu, leur divulgation totale ou partielle ou leur invocation à la charge de quiconque ».

Quid de la pratique ? Ce n’est un secret pour personne qu’elle est souvent loin de toute règle juridique…

Quelques liens :

Agit-on vraiment pour combattre la corruption au Maroc?

Parmi les revendications du mouvement du 20 février, la lutte contre la corruption au Maroc figure en bonne place. Le pays gangréné par la corruption à tous les niveaux, du plus haut fonctionnaire au chaouch de service, fait figure de cancre quand il s’agit de classements internationaux dans le domaine. Ainsi, il est passé du 52e rang en 2002 au 85e en 2010 dans l’Indice de Perception de la Corruption élaboré par Transaprency International. Preuve s’il en est besoin, que la multitude de commissions et d’instances mises en place par les différents gouvernements depuis une décennie n’ont servi à rien, ou pas grand chose… Le citoyen lambda ne perçoit aucun changement dans les pratiques, voire une situation qui empire.

Des mesures parfois très simples peuvent changer les choses. Une des premières causes de la corruption, et le manque d’information du citoyen. Pourquoi ne pas améliorer l’accès à l’information, expliquer les procédures administratives, clarifier aux citoyens leurs droits… Des portails Internet existent certes, mais la communication via des posters et des affiches dans les administrations est quasi-absente.

Autre point : la dénonciation. La loi marocaine actuelle ne protège pas les dénonciateurs de faits de corruption. Un dénonciateur peut facilement être considéré comme complice, et donc passible de poursuites judiciaires. L’Instance Centrale de Prévention de la Corruption (ICPC) n’a cessé de demander la protection légale des dénonciateurs. Aucune loi n’existe jusqu’aujourd’hui dans ce sens. Une petite expérience a néanmoins été lancée par l’ICPC , mais qui ne concerne aujourd’hui que les dénonciations “dans le cadre de marchés publics ou d’opérations d’investissement relatifs aux Petites et Moyennes Entreprises (PME)”. Sauf que l’ICPC ne jouit d’aucun pouvoir qui lui permet de saisir la justice en cas de dénonciation. Grosse lacune institutionnelle donc.

Ceci concernait la corruption “subie” par les citoyens. Qu’en est-il de la corruption “voulue”? Soudoyer un fonctionnaire pour fermer les yeux sur un plan de construction non conforme ou un policier/gendarme pour une infraction au code de la route reste très commun. Et là, il ne faut plus compter sur la dénonciation. C’est là que le contrôle judiciaire et administratif doit intervenir. Déclarations du patrimoine et inspections doivent être la règle dans un pays qui se veut démocratique et transparent. Mais c’est encore loin d’être le cas au Maroc. L’impunité reste la règle, même dans le cas de graves dysfonctionnements, comme ceux établis par la Cour des Comptes par exemple. Autre exemple : malgré l’obligation dans le nouveau code de la route du port d’un badge identifiant, on ne voit plus aucun agent de l’ordre (policier ou gendarme) porter son badge. N’est-ce pas un signe d’impunité ostentatoire?

Pourquoi nos gouvernants ne s’inspirent-ils pas d’autres pays qui ont eu quelques succès dans la lutte contre la corruption? En Inde par exemple, il existe un portail “I paid a bribe” qui collecte les plaintes des citoyens ayant été obligés de payer un pot de vin pour accéder à un service public. Lors d’un récent voyage en Tanzanie, j’ai pu voir ces pancartes un peu partout dans les lieux publics invitant à dénoncer les actes de corruption commis par les fonctionnaires publics :

Que perd-t-on à installer ce type de pancartes dans les arrondissements administratifs, les commissariats et les hôpitaux? Rien. Absolument rien. Combien de temps faudra-t-il pour instaurer une loi qui protège les dénonciateurs? On l’attend depuis au moins 10 ans. La loi anti-terrorisme a bien été approuvée en 10 jours, non? Que fait la justice pour poursuivre les corrompus parmi les hauts fonctionnaires de l’État? Est-elle trop occupée à juger les dénonciateurs des complices de trafiquants de drogue à Nador?

Quand on voit ce qu’on voit, que l’on entend ce qu’on entend et que l’on sait ce que qu’on sait, on a raison de penser ce qu’on pense. Que l’État n’a aucune envie de combattre la corruption, et que certains ont tout intérêt à que cela perdure…

Manifestations du 20 mars au Maroc : quelles leçons? (+ Photos)

Après des manifestations à succès le 20 février, les marocains sont à nouveau sortis dans les rues ce 20 mars 2011. Les manifestations se sont globalement bien déroulées, malgré des craintes de répression policière sauvage après celle du 13 mars à Casablanca. Les forces publiques sont restées finalement quasi-invisibles se contentant de suivre la marche de loin.

Mais que pouvaient demander ces manifestants après le discours royal du 9 mars? Le roi n’a-t-il pas annoncé des réformes constitutionnelles, conformément aux demandes des manifestants du 20 février?

Le discours a certes été globalement positif, mais la manière de réformer ne correspondait pas à ce qu’attendent une bonne partie des marocains. Plutôt que d’appeler à l’élection d’une assemblée constituante (comme cela se fera en Tunisie et comme ça s’est fait en Islande), puis de soumettre le texte à un référendum, le roi a préféré nommer une commission chargée de réformer la constitution, puis de la soumettre au référendum. Cette méthode ne garantit absolument pas que les revendications du peuple marocains seront prises en compte, et connaissant la machine médiatique et sécuritaire du makhzen, il ne fait aucun doute que cette constitution sera adoptée à plus de 90%… En 55 ans d’histoire indépendante du Maroc, aucune constitution n’a été adoptée à un niveau inférieur…

Le reste des revendications du mouvement du 20 février porte sur l’indépendance de la justice (le roi préside toujours le conseil suprême de la magistrature), la séparation entre le pouvoir et les affaires (le mastodonte SNI garde toujours la main sur d’importants pans de l’économie marocaine), l’instauration d’une vraie culture contre l’impunité des dirigeants du secteur public, la libération de tous les détenus politiques, une plus grande liberté de presse et un service public médiatique plus ouvert à la diversité politique et sociale.

D’autres revendications à caractère social sont évoquées par le mouvement du 20 février (emploi, santé, éducation, logement, vie chère…). Mais à mon humble avis, le jour où on aura un gouvernement issu de la vraie volonté populaire, qui rend des comptes devant le peuple, et où sont représentés les meilleurs compétences que compte le pays, ces questions sociales seront naturellement adressées.

Quand on voit que les quelques manifestations du 20 février ont déclenché énormément de réactions en si peu de temps, cela nous incite à continuer la mobilisation pour maintenir le momentum.

Mais s’il y a une chose dont on peut déjà se réjouir, c’est le regain d’intérêt des marocains pour la politique. On peut déjà s’attendre à des taux de participation élevés lors des prochaines élections, loin des ridicules 20-30% des élections de 2007. Reste aux partis politiques de mieux répondre aux attentes des marocains, et à être plus proche des citoyens et de leur revendications. C’est leur rôle, et il semble qu’ils n’ont pas tous reçu le message.

Pour finir, ce qui m’a le plus frappé dans ces manifestations du 20 février et 20 mars, c’est que c’est la première fois pour des gens de ma génération (j’ai 26 ans) qu’on sort aussi massivement manifester pour notre pays. Nous qui n’avions l’habitude que de sortir pour les autres. Palestine pendant la 2ème intifada, Iraq lors de l’invasion américaine. Il était temps qu’on exprime notre mécontentement par rapport à ce qui se passe au Maroc.

Photos disponibles sur demande / Photos available on request

Liens :

Photos des manifestations du 20 février à Rabat

Révolution tunsienne : Et le Maroc dans tout cela?

Le dictateur est tombé. La Tunisie respire et savoure sa révolution des jasmins construite sur le sang de dizaines de martyrs. Jamais un état arabe ne s’était débarrassé de la sorte de son dictateur. Seuls la Faucheuse, un putsch ou une invasion étrangère pouvaient les écarter de leurs confortables fauteuils.

Tirer à balles réelles sur les manifestants aura été la goute qui a fait débordé le vase des tunisiens. Ils n’en pouvaient plus de ce régime mafieux, oppressant et sanguinaire. Et le soutien de l’armée fut crucial dans ce combat. Fidèle à un principe de non-ingérence qui datait de l’ère Bourguiba, elle a obligé Ben Ali à fuir pour éviter un bain de sang. A noter que l’armée tunisienne ne dispose que de 35 000 hommes contre 120 000 hommes pour la police! C’est dire le degré de “policiarisation” du pays!

Maintenant, la question que se posent beaucoup : est-ce que cette révolution sera contagieuse?

Quoique disent les dirigeants arabes et leurs agences de presse, aucun régime arabe n’est considéré par les standards internationaux comme démocratique, ni même hybride. Ils sont tous classifiés comme autoritaires, doux euphémisme dont héritent également certaines dictatures sanguinaires.

Mais les conditions sont loin d’être les mêmes pour tous les pays. Si dans une très grande majorité, le pouvoir est soutenu par l’armée, des subtilités existent. Certains prétextent un état d’urgence instauré depuis les premières guerres contre Israël, d’autres invoquent les spécificités religieuses et culturelles de leurs peuples, sans oublier ceux qui prétendent avoir dépassé le stade de la démocratie et avoir atteint la perfection en terme de gouvernance (se référer au chapitre correspondant dans le Livre Vert).

Qu’en est-il au Maroc? Peut-on s’attendre à des évènements similaires?

Mis à part chez d’irréductibles 9% nihilistes, la monarchie marocaine reste très populaire. Le fameux sondage du Monde/Telquel l’avait bien confirmé à ceux qui en doutaient encore.

La situation économique est par contre assez similaire. Dépourvus de richesses pétrolières, les deux pays comptent beaucoup sur le tourisme ainsi que l’industrie et services tournés vers l’export comme importants générateurs d’emploi et de rentrées en devises. La crise mondiale a eu des effets négatifs sur les carnets de commande et du coup sur l’emploi, surtout dans le secteur du textile. Par ailleurs, les taux de chômage des jeunes reste très important, à une différence près pour la Tunisie qui “produit” plus de diplômés de l’enseignement supérieur (comparés à la population totale).

Les Trabelsi/Ben Ali avaient constitué un clan tentaculaire qui a pris le contrôle d’une très grande partie de l’économie tunisienne. On retrouvait leurs traces dans tous les secteurs (les plus juteux surtout), et n’hésitaient pas à mettre à genou leurs concurrents sans se soucier d’aucune règle de droit. Beaucoup de chefs d’entreprises tunisiens préféraient garder des parts de marché modestes dans leurs secteurs, et faire profil bas, plutôt que de devenir trop voyants et de susciter des convoitises inutiles de la part du clan régnant.

Au Maroc, il existe un terme pour définir cette sphère économique qui bénéficie des faveurs et de la proximité avec le pouvoir : le “Makhzen économique”. On est certes loin de l’hégémonie des Trabelsi/Ben Ali, mais certains secteurs sont loin d’être tout à fait concurrentiels. Prenez par exemple celui du sucre, de l’huile, ou de la grande distribution. Et les faveurs du pouvoir ne manquent pas pour certains acteurs de l’immobilier, de la finance, de l’agriculture, voire même des panneaux publicitaires!

Les investisseurs étrangers souhaitant s’installer au Maroc s’en plaignaient souvent et déchantaient très vite à l’idée d’investir dans des secteurs “pas très fair”. La fusion ONA/SNI et son intention de réduire ses participations dans ses filiales agro-alimentaires vient sans doute après des pressions européennes dans le cadre de l’accord du Statut Avancé entre le Maroc et l’Union Européenne.

Et le PAM dans tout cela? Peut-on vraiment comparer le RCD tunisien à notre PAM national? Si la proximité au pouvoir est commune aux deux, les schémas sont totalement différents. D’un coté nous avons un parti quasi-unique baignant aux cotés d’une opposition fantoche, et d’un autre, un parti makhzanéen dont la création remonte à 3 ans, qui rafle tout ce que le pays compte comme opportunistes et qui a pour principal but d’affaiblir les autres formations politiques et de servir les intérêts obscurs du Makhzen. Celui-ci devrait être conscient que le rôle d’un parti politique est surtout d’encadrer les citoyens et de porter leurs revendications. Créez le vide politique, et ces revendications finiront par s’exprimer dans la rue, avec tout le risque de violences que cela peut engendrer.

Sur le plan de la liberté d’expression, la différence reste tout de même notable. Si la presse et les médias étaient complètement muselés et Internet largement censuré en Tunisie, une certaine marge de manœuvre existe au Maroc. Mais avec la fermeture de plusieurs journaux et magazines, et les condamnations lourdes de journalistes, ces libertés sont entrain de reculer sérieusement.

On n’a peut-être pas besoin d’une révolution au Maroc, mais on a besoin d’une très sérieuse remise en question de tout ce qui a été fait durant les dix dernières années dans le pays. Des réorientations politiques et des réformes constitutionnelles sont nécessaires pour corriger le tir. Et qu’on arrête de nous dire qu’il faut arbitrer entre respect des libertés et prospérité économique. L’un ne peut marcher sans l’autre. La Tunisie en est aujourd’hui la preuve.

Quelques liens :

Maroc et Chine : Solidaires contre les droits de l’Homme

Depuis l’annonce de l’attribution du Prix Nobel de la Paix à l’opposant chinois Liu Xiaobo, les autorités chinoises sont en furie. L’ambassade chinoise à Oslo a envoyé un courrier menaçant de “conséquences” les représentations diplomatiques étrangères qui assisteraient à la cérémonie de remise du Nobel.

Chaque année, l’Institut Nobel invite tous les ambassadeurs en poste dans la capital norvégienne à la somptueuse cérémonie. Et surprise, 6 pays ont décliné l’invitation : la Chine (normal), la Russie (un peu moins normal), le Kazakhstan (solidarité entre dictateurs oblige), Cuba (faut pas rêver non plus), l’Iraq (mouais), et le Maroc.

Notre pays a, semble-t-il, cédé aux pressions chinoises, et renoncé à assister à la cérémonie de remise des Nobel. Mais en échange de quoi? Quelle type de représailles peut-t-on attendre des chinois? Ces derniers ne sont pas aussi présents au Maroc que dans d’autres pays d’Afrique (où on commence à parler de Chine-Afrique). Les exportations marocaines vers la Chine sont plutôt faibles. Donc aucun risque de boycott ou d’embargo. La seule explication qui me parait logique, serait la position chinoise dans l’affaire du Sahara. Le Maroc s’est assuré d’une position plutôt neutre des chinois dans le conflit, en échange de la non reconnaissance des marocains de Taïwan (tout comme le Maroc ne reconnait pas le Kosovo, en échange du soutien de la Serbie).

Mais la raison est peut-être ailleurs. Et si les chinois avaient menacé d’embargo sur les exportations de thé vert? Le Maroc en est le premier client dans le Monde, et une rupture d’approvisionnement, suffirait à mettre à feu et à sang tout le pays. Pourriez vous imaginer un seul instant une théière marocaine sans thé vert? CQFD. 😀

Liberté de la presse au Maroc : Quand on atteint le fond, on creuse encore

Le classement mondial 2010 de la liberté de la presse de “Reporters sans frontières” a été publié aujourd’hui, et le verdict est sans appel : le Maroc est classé 135ème/178 pays, perdant 38 places en 4 ans (97ème en 2006), et 8 places par rapport à l’année dernière. Et comme d’habitude, on se retrouve derrière des pays comme le Burkina Faso (49e), la Guinée-Bissau (67e, récemment scène de plusieurs coups d’états), le Zimbabwe de Mugabe (123e), l’Algérie (133e) ou le Venezuela de Chavez  (133e).

Ce classement ne fait que confirmer la situation que vit la presse depuis deux ans : fermeture du Journal Hebdomadaire et de Nichane, poursuites judiciaires contre les directeurs d’Al Jarida al Oula, d’Al Michaal et d’Akhbar al Yaoum, interdiction de Telquel… Les harcèlements que subit la presse écrite ne se comptent plus. Les méthodes diffèrent mais ont toutes le même but : boycott publicitaire des plus gros annonceurs, amendes astronomiques, saisies, prison pour les directeurs de publication. Tout pour rappeler les heures les plus sombres de la liberté de la presse pendant les années de plomb.

Mais quand on parle de liberté de la presse au Maroc, on oublie souvent la presse audio-visuelle. Or, le Maroc est très en retard par rapport aux pays africains par exemple. Certes, le nombre de radios a sensiblement augmenté ces trois dernières années, mais le contenu n’a pas vraiment suivi. La plupart se contentent de diffuser de la musique à longueur de journée, avec quelques émissions de débat confinés à des sujets de société : mariage, divorce, éducation des enfants, santé, et j’en passe. Les bulletins d’informations nationales reprennent pour leur majorité les communiqués de la MAP, et s’aventurent rarement plus loin. Pour les débats politiques, vous pouvez toujours rêver. Ou regarder Hiwar de Mustapha Alaoui. Ah, les télés? Aucune télévision privée n’est autorisée. Passez votre chemin. Certains opérateurs avaient essayé de postuler pour des licences de télévision, mais aucune n’a été délivrée. Motif officiel : le marché publicitaire marocain n’est pas assez développé pour permettre à d’autres chaines de télévisions de s’installer au Maroc. Soit. Mais quelqu’un de la HACA pourrait nous expliquer comment font les 14 chaines TV privées du Kenya pour survivre?

Il ne faut pas chercher plus loin. Le Makhzen sait très bien que la télévision est de loin le média qui a le plus d’influence sur la population. Et il fera tout pour en garder le contrôle. Zappez, il n’y a rien à voir.

Ich bin ein 9%!

Telquel Couverture

Élégante manière de célébrer une décennie de règne de Mohammed VI. Le ministère de l’intérieur a ordonné la saisie des derniers numéros des magazines Telquel et Nichane. La raison invoquée : un sondage réalisé par LMS-CSA réalisé pour Telquel, Nichane et Le Monde a révélé que 91% des marocains jugent satisfaisant ou très satisfaisant le bilan de 10 ans de règne de Mohammed VI. Le Monde devrait d’ailleurs publier ce sondage dans son édition datée du Mardi 4 Aout 2009.

Le makhzen semble offusqué par l’idée de voir l’action du roi jugée par les citoyens. Et c’est le professeur de Droit Constitutionnel, militant communiste du PPS, et actuel ministre de la Communication qui le confirme : “La monarchie au Maroc n’est pas en équation et ne peut faire l’objet d’un débat même par voie de sondage”. Le plus étrange dans l’histoire, et comme le souligne si bien Larbi, c’est que le Matin du Sahara, n’hésitait pas il y a quelques mois à inciter ses lecteurs à voter pour le roi du Maroc dans un sondage organisé par un magazine arabe. Hoba Hoba Spirit ne croyaient pas si bien dire en traitant le Maroc de Blade Schizo…

Dès que le nouvelle était tombée hier après midi, la Blogoma, et surtout la Twitoma ont été extrêmement réactifs, et un mouvement de “Je suis un 9%” est né. On trouve désormais des bannières, un hashtag sur Twitter, et un groupe Facebook.

9 pour cent

Un autre débat commence également à surgir autour du slogan “Je suis un 9%”. Veut-il dire qu’on juge négatif le bilan de 10 ans de règne de Mohammed VI, ou bien qu’on est pour la liberté de la presse?

Dans mon cas, mon jugement de la décennie de règne, reste très mitigé. Il y a eu beaucoup d’avancées dans tous les domaines, mais énormément d’occasions ratées en une décennie. Le débat est très large en tout cas… Le fait pour moi d’adhérer au mouvement “Je suis un 9%” souligne surtout que je suis pour la liberté d’expression, et pour que les marocains puissent juger celui qui les gouverne vraiment, et qui concentre la quasi-totalité des pouvoirs entre ses mains.

EDIT : Une dépêche de l’AFP donne le détail des chiffres du sondage.

Coup de gueule : Plagiat de la part du Courrier de Casablanca

Pirates du Net

EDIT : Cinq jours après la publication de ce post, j’ai reçu un email de M. Amine Squalli du Courrier de Casablanca, mentionnant que le fait de ne pas voir mis la référence de l’article est dû à un oubli. Le problème est désormais résolu. 🙂

J’ai publié récemment un article sur le lancement de l’offre triple play chez Maroc Telecom, faisant part de mon point de vue sur cette offre. Quelques jours après, je retrouve mon article copié tel quel, sans aucune modification, sur le site du Courrier de Casablanca. L’article ne porte aucune mention de la référence ni de l’auteur. Le journal électronique se permet même de mettre cet article en 1ère page! C’est ce qu’on appelle du culot!

J’ai pris la peine d’écrire à la rédaction du site, leur demandant de retirer l’article ou au moins d’en mentionner la source, mais je n’ai reçu aucune réponse à ce jour. Ce comportement, hélas de plus en plus fréquent sur les sites marocains, nuit gravement à la création, et au développement d’un contenu sur les sites Internet marocains. Un journal électronique qui a l’air tout à fait respectable, mais qui utilise des méthodes dignes de pirates du net, n’est même pas capable de rédiger lui même un article sur un événement majeur dans l’évolution d’Internet au Maroc.

Si vous posséder un blog, vous pouvez vérifier si votre contenu a été plagié en utilisant l’excellent Copyscape.