Comment faire décoller la fibre optique au Maroc?

La stratégie Digital Morocco 2030 affiche un objectif très ambitieux pour le Maroc en termes de connectivité à la fibre optique : 4,4 millions de foyers éligibles en 2026 et 5,6 millions en 2030. Ce nombre n’était que de 1,5 millions en 2022, pour 611.000 foyers effectivement connectés à la fibre.

Cet objectif est-il atteignable en l’état actuel du secteur? Peut-être. Mais les entraves sont encore très nombreuses.

Selon les derniers chiffres de l’ANRT, 919.000 foyers étaient connectés à la fibre optique à la fin du T1 2024, avec une progression annuelle moyenne de 57% entre 2020 et 2023. L’ADSL affiche, quant à lui, une quasi stagnation depuis 2020. Ces deux segments d’Internet filaire, ne représentent que 6,6% du parc connecté au Maroc. L’Internet mobile représentant 93% du parc.

Comment peut-on interpréter ces chiffres? De plus en plus de foyers anciennement connectés à l’ADSL optent pour la fibre optique afin d’accompagner l’évolution de leurs besoins de bande passante, notamment pour l’IPTV, le gaming et les visio-conférences accompagnant l’essor du télétravail. En parallèle, certains foyers souhaitant s’équiper d’Internet filaire en complément d’Internet mobile, par souci d’optimisation du budget de la famille et d’accomapagner des usages scolaires ou de divertissement, ne sont pas éligibles à la fibre ou la trouvent encore trop chère. Ceux-ci se tournent malgré eux vers l’ADSL, technologie d’un autre âge, mais permettant d’avoir un volume de data illimité à un budget relativement acceptable.

Comment faire pour atteindre les objectifs de Morocco Digital 2030 dans ces conditions? Les entraves sont, à mon avis, essentiellement de nature réglementaire et concurrentielle.

Commençons par comparer les offres des 3 opérateurs (hors promotions), celles de 20 Mb/s ne pouvant pas être considérées comme des débits de fibre optique.

Un foyer aujourd’hui équipé en ADSL, à un prix généralement situé entre 200 et 250 Dh/mois, et qui souhaite se tourner vers la fibre optique, serait tenté par une offre d’Orange ou d’Inwi à 349 Dh/mois. Problème : ces 2 opérateurs ne couvrent que des zones très limitées et plutôt denses dans les grandes villes. S’il opte pour Maroc Telecom, à la couverture beaucoup plus étendue, il devra débourser minimum 500 Dh/mois, soit au moins le double de ce qu’il paye pour l’offre ADSL. Dans une période de forte inflation et de crise du pouvoir d’achat, peu se tournent finalement vers cette solution.

Mais pourquoi l’offre de Maroc Telecom est aussi chère? Il s’agit d’une obligation de l’ANRT qui ne permet pas à l’opérateur historique de commercialiser son offre de fibre optique à moins de 500 Dh/mois, avec comme objectif de favoriser les 2 autres opérateurs, et d’éviter la situation de quasi-monopole de l’opérateur historique qui a longtemps prévalu dans l’ADSL.

Problème : ça ne marche pas. Orange et Inwi se concentrent sur les zones urbaines les plus denses (et donc les plus rentables). Maroc Telecom qui a une politique d’investissement dans la fibre plus volontariste, est beaucoup plus cher. On se retrouve donc dans un marché où la concurrence est faussée par une décision du régulateur.

Résultat : Un taux de pénétration de la fibre, nettement en deça du potentiel du marché et des objectifs gouvernementaux, en plus de prix pratiqués par les opérateurs marocains nettement plus élevés que ceux pratiqués par des opérateurs européens, qui fournissent des débits jusqu’à 10 fois supérieurs. Il suffit de parcourir des comparatifs français, espagnols, portugais, ou britanniques pour s’en rendre compte.

Source : European Broadband and Operators Benchmark, by Point Topic, Q2 2024. Inclut les offres ADSL, cable et fibre.

Comment remédier à cette situation? Par des leviers essentiellement réglementaires.

D’abord, en levant toute contrainte tarifaire pour les opérateurs et laisser la concurrence libre s’installer entre eux. Il est inconcevable d’obliger un opérateur à commercialiser son offre à un prix minimum, comme cela se fait aujourd’hui.

Ensuite, obliger les opérateurs à partager leur infrastructure en instaurant la mutualisation des réseaux de fibre. Cela aura pour intérêt d’éviter que les clients ne se retrouvent bloqués chez un opérateur, de favoriser la concurrence sur les prix et la qualité de service, mais aussi d’éviter que chacun des opérateurs ne creuse des tranchées pour son propres réseau, comme c’est souvent le cas dans nos villes.

Dernière mesure, et non des moindres : ouvrir le marché de la fibre optique à des opérateurs d’infrastructure comme cela est d’usage dans d’autres pays. Opérateurs spécialisés dans l’installation de réseaux de fibre, ceux-ci les louent ensuite aux opérateurs télécoms qui peuvent y commercialiser les offres qu’ils souhaitent. Qu’elles soient faites sur des initiatives purement privées (notamment dans les zones urbaines les plus denses) ou en partenariat avec des collectivités locales (régions, communes…) et/ou des partenaires publics (notamment dans des zones moins denses), ceci a pour principal avantage d’alléger les Capex des opérateurs télécoms et de favoriser la connectivités des territoires qui ne sont pas prioritaires (et suffisemment rentables).

Dans un secteur aussi oligopolistique que les télécoms, l’intervention du régulateur est déterminante pour un développement efficient des réseaux. L’ANRT se doit de réinventer les règles pour ne pas entraver le développement de la fibre optique, et se retrouver dans un Maroc mal connecté à horizon 2030.

Cette tribune a été publiée sur Médias24.

Levées de fonds Tech : le Maroc bientôt dans le Top 4 africain ?

Dans l’édition 2023 de son rapport annuel qui fait référence, Partech classe le Maroc 5ème au niveau africain en termes de levées de fonds pour startups tech, juste derrière les Big 4 historiques (Afrique du Sud, Nigeria, Egypte et Kenya) avec des levées totalisant 93 US$M pour 17 deals.


Certes, ce chiffre inclut 62 US$M levés par CashPlus, mais même retraitée de ce deal, la position du Maroc reste plus qu’honorable, relativement à celle d’il y a quelques années, surtout dans un contexte de mondial de recul des levées de fonds.

On compte aujourd’hui une dizaine de fonds actifs sur le marché marocain, contre seulement 2 ou 3 il y a 7-8 ans. Le programme Innov Invest de Tamwilcom porte ses fruits, et d’autres programmes publics devraient s’ajouter pour mettre plus de financement à disposition d’entrepreneurs innovants marocains.

Aujourd’hui, si vous avez un projet innovant, prometteur, avec des fondateurs de qualité et un positionnement marché intéressant, vous ne devriez pas avoir trop de mal à convaincre un des 10 fonds VC de la place pour lever des fonds jusqu’à 10-15 MDH. La difficulté se situe plus dans des levées plus importants, où nous avons clairement un déficit, surtout pour des tickets entre 15 et 50 MDH, encore trop grands pour les fonds VC locaux, et trop petits pour des fonds de Private Equity marocains.

Alors peut-on faire mieux et faire partie des Big 4 africains dans les 5 prochaines années? Ca s’annonce plus compliqué pour plusieurs raisons :

1- Les fonds capables d’investir des centaines de millions de USD dans des startups marocaines sont surtout étrangers. Or ceux-ci ont pour important critère d’investissement la taille des marchés investis. Le Maroc souffre de la taille, relativement réduite, de son marché, ainsi que de son manque flagrant d’intégration régionale. Les Big 4 disposent de marchés de plus de 100 millions d’habitants (Egypte et Nigéria) ou sont très bien intégrés régionalement (Afrique du Sud et son hinterland historique, et le Kenya leader des économies de l’Afrique de l’Est). Le Maroc n’est malheureusement ni l’un, ni l’autre.

2- Le secteur qui attire le plus de fonds en Afrique est la Fintech (et dans une moindre mesure la Climatech). Or le Maroc a une position ambigüe en la matière : nous avons d’un côté un taux de bancarisation/intégration financière qui approche des 50-60%, loin devant l’Afrique subsaharienne (~10% de taux de bancarisation) où le potentiel marché est encore énorme, mais aussi loin derrière les taux en Europe qui frôlent les 100%. Nous avons également un marché financier dominé (pour ne pas dire verrouillé) par les banques, avec un régulateur Bank Al-Maghrib, très conservateur dans son approche et pour qui, il est beaucoup plus important d’avoir des acteurs financièrement solides, plutôt que de nouveaux outsiders innovants. C’est une approche qui se respecte, mais qui est très discutable si on veut voir émerger une réelle innovation dans le secteur avec des acteurs qui disruptent le marché (cf point suivant).

3- Le Maroc a une économie conservatrice et rentière. Nous sommes loin d’avoir une économie schumpéterienne qui favorise la création destructrice : pour innover, il faut forcément détruire d’anciens paradigmes. Or pour beaucoup de raisons (qu’il est inutile de détailler ici), des secteurs entiers restent à l’abri de l’innovation, afin de maintenir des positions dominantes d’acteurs traditionnels. De plus, la réglementation très stricte ne favorise absolument pas l’émergence de nouveaux acteurs dans des secteurs minés par les dysfonctionnements : finance, assurance, mobilité urbaine, drones…

4- Paradoxalement, l’Etat marocain déploie de plus en plus d’effort pour le financement des startups innovantes, mais n’achète quasiment pas les produits innovants de ces mêmes startups. Le secteur public reste le premier donneur d’ordre du pays, mais préfère dans une large mesure s’approvisionner auprès d’acteurs étrangers pour ses besoins technologiques. Or, je reste convaincu que beaucoup de problématiques marocaines ne peuvent être adressées que par des startups qui comprennent les problématiques et enjeux locaux, sans oublier le facteur coût qui devrait normalement favoriser les startups marocaines, ainsi que les enjeux de souveraineté qui s’imposent dans un contexte géopolitique globalement instable.

Pour conclure, il est important de maintenir les acquis actuels en termes de financement de l’innovation, mais de penser sérieusement aux entraves qui nous empêchent de passer au niveau supérieur. Si on veut continuer de garder nos startupers au Maroc.

Cette tribune a été publiée par Telquel.

Taxe sur les superprofits : quels secteurs cibler?

«J’appelle tous les gouvernements à taxer ces profits excessifs, et à utiliser ces fonds pour soutenir les plus vulnérables en ces temps diffciles». C’est ainsi que s’exprimait Antonio Guterres, le Secrétaire Général de l’ONU le 3 août 2022, à propos des superprofits réalisés par les sociétés pétrolières et gazières, qui profitent du contexte géopolitique mondial pour engranger des bénéfices records.

Depuis début 2022, plusieurs pays ont ainsi sauté le pas, et instauré des impôts exceptionnels sur les secteurs ayant profité ayant profité le plus de la conjoncture internationale, mélant la guerre d’Ukraine, le contexte post-Covid et les premières conséquences du changement climatique.

En Italie, l’impôt sur les superprofits est passé de 10% en mars 2022 à 25% en mai 2022 sur les géants de l’énergie.

En Grèce, la taxe sur les profits des producteurs d’électricité est passée à 90%.

En Espagne, le gouvernement a d’ores et déjà annoncé une taxe exceptionnelle sur les banques et les grandes sociétés énergétiques.

En France, la décision de taxer les superprofits des géants de l’énergie est actée, et une taxe additionnelle sur les “superdividedes” est également en cours de discussion.

Quid du Maroc? Si on ne connait pas encore le contenu exacte de la Loi des Finances 2023 (à la date d’écriture de ces lignes), Medias24 avait annoncé la volonté du gouvernement de surtaxer certains secteurs oligopolistiques. Lesquels? Aucune décision formelle pour le moment, mais le débat risque d’être animé au Parlement.

Comment choisir ces secteurs? Si la Direction Générale des Impôts dispose de données annuelles sur les croissances de chiffre d’affaires et marges nettes réalisées par les entreprises, l’utilisation des données des sociétés côtées à la Bourse de Casablanca (BVC) permet d’avoir des données trimestrielles ou semestrielles plus récentes.

Les sociétés côtées à la BVC sont représentatives de la quasi-totalité des secteurs de l’économie marocaine (à l’exception notable du secteur agricole), ce qui permet d’avoir une vue globale des secteurs surperformeurs en ces temps de disette.

En analysant les données financières sur 4 ans d’une trentaine de sociétés côtées les plus importantes et les plus représentatives de leur secteurs respectifs, on peut identifier les secteurs à surtaxer en priorité.

On peut retenir trois paramètres principaux pour décider ou non la surtaxation des profits :

  • Nature oligopolistique du secteur
  • Evolution du niveau des marges nettes
  • Niveau de taxation actuel
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Liste des pays sans visas pour les marocains

Apposer un visa sur un passeport marocain n’est heureusement pas une fatalité pour voyager hors des frontières marocaines. Il existe en effet soixantaine de pays qui ne requièrent pas de visa d’entrée, ou qui accordent des visas à l’arrivée au pays. Ces pays sont :

Afrique

Pays et territoires Conditions d’accès
Drapeau du Bénin Bénin  3 mois 
Drapeau du Cap-Vert Cap-Vert Visa délivré à l’arrivée pour 25 Euros  (7 jours)
Drapeau des Comores Comores Visa délivré à l’arrivée pour 30 Euros
Drapeau du Congo République du Congo (Brazzaville) Visa obtenu à l’arrivée
Drapeau de Côte d'Ivoire Côte d’Ivoire 3 mois
Drapeau de Djibouti Djibouti Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 75€ (1 mois)
Drapeau du Gabon Gabon 1 mois
Drapeau de Gambie Gabon 3 mois
Drapeau de Guinée Guinée  3 mois 
Drapeau du Kenya Kenya Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 50 USD (3 mois) 
Drapeau de Madagascar Madagascar Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 140 000 MGA (3 mois) 
Drapeau du Mali Mali 3 mois
Drapeau de Maurice Iles Maurice Visa de 2 mois obtenu à l’arrivée
Drapeau du Mozambique Mozambique Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 66 USD (1 mois)
Drapeau du Niger Niger 3 mois
Drapeau du Rwanda Rwanda Visa de 1 mois obtenu à l’arrivée (30 USD)
Drapeau de Sao Tomé-et-Principe Sao Tomé-et-Principe Visa à demander en ligne 
Drapeau du Sénégal Sénégal  3 mois 
Drapeau des Seychelles Seychelles Visa délivré à l’arrivée (1 mois) 
Drapeau de TanzanieTanzanie Visa délivré à l’arrivée (3 mois)
Drapeau du Togo Togo  3 mois 
Drapeau de Tunisie Tunisie Oui
Drapeau d'Ouganda Ouganda Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 50 USD (1 mois) 

 

Amériques

Pays et territoires Conditions d’accès
Drapeau de Bolivie Bolivie Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 52 USD
Drapeau de Colombie Colombie 3 mois
Drapeau : Brésil Brésil 3 mois
Drapeau de Dominique Dominique 3 semaines
Drapeau d'Équateur Équateur 3 mois
Drapeau de Grenade Grenade Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 40 USD
Drapeau : Guyana Guyana Visa délivré à l’arrivée (1 mois)
Drapeau d'Haïti Haïti 3 mois
Drapeau du Nicaragua Nicaragua Visa délivré à l’arrivée (3 mois, 20 USD)
Drapeau Saint-Vincent-et-les-Grenadines  1 mois 

Asie

Pays et territoires Conditions d’accès
Drapeau du Cambodge Cambodge Visa délivré à l’arrivée (pour 1 mois)
Drapeau de Corée du Sud Corée du Sud 3 mois
Drapeau de Géorgie Géorgie Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 50 GEL (3 mois)
Drapeau de Hong Kong Hong Kong  1 mois 
Drapeau d'Indonésie Indonésie 1 mois
Drapeau d'Iran Iran Visa délivré à l’arrivée (15 jours) 
Drapeau de Jordanie Jordanie Visa délivré à l’arrivée. Conditions spéciales pour les femmes entre 17 et 35 ans
Drapeau du Laos Laos Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 30 USD (1 mois)
Drapeau de Macao Macao 3 mois
Drapeau de Malaisie Malaisie 3 mois
Drapeau des Maldives Maldives Visa délivré à l’arrivée (1 mois)
Drapeau du Népal Népal Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 25 à 100 USD (1 à 3 mois)
Drapeau des Philippines Philippines 1 mois
Drapeau du Sri Lanka Sri Lanka Visa délivré à l’arrivée (1 mois), après inscription en ligne
Drapeau du Tadjikistan Tadjikistan Visa délivré à l’arrivée (45 jours)
Drapeau du Timor oriental Timor oriental Visa délivré à l’arrivée pour la somme de 30 USD (1 mois)
Drapeau de la ThaïlandeThaïlande 2 mois
Drapeau de Turquie Turquie  3 mois 

Europe

Pays et territoires Conditions d’accès
Drapeau d'Azerbaidjan Azerbaïdjan 3 mois 

Océanie

Pays et territoires Conditions d’accès
Drapeau des Îles Cook Îles Cook  1 mois 
Drapeau des États fédérés de Micronésie Micronésie  1 mois 
Drapeau de Niue Niue  1 mois 
Drapeau des Palaos Palaos Visa délivré à l’arrivée (1 mois)
Drapeau des Samoa Samoa Visa délivré à l’arrivée (2 mois)
Drapeau de Tuvalu Tuvalu Visa délivré à l’arrivée (1 mois)
Drapeau de Vanuatu Vanuatu 1 mois

Si vous avez un visa Schengen valide, avec entrées multiples, vous pouvez vous rendre en plus à ces pays situés hors zone Schengen :

Pays et territoires Conditions d’accès
Drapeau d'Albanie Albanie [1]
Drapeau d'Andorre Andorre  
Drapeau d'Antigua & Barbuda Antigua & Barbuda [1]
Drapeau d'Aruba Aruba [1]
Drapeau de Bosine Bosnie Herzégovine [1]
Drapeau de Bulgarie Bulgarie [1]
Drapeau du Costa Rica Costa Rica [1]
Drapeau de Croatie Croatie [1]
Drapeau de Chypre Chypre [1]
Drapeau de République dominicaine République dominicaine [1]
Drapeau du KosovoKosovo  
Drapeau du Salvador Salvador [1]
Drapeau de Macédoine du NordMacédoine du Nord [1]
Drapeau de GibraltarGibraltar [1]
Drapeau du Guatemala Guatemala [1]
Drapeau du Honduras Honduras [1]
Drapeau du Mexique Mexique [1]
Drapeau du MontenegroMontenegro [1]
Drapeau du MontserratMontserrat [1]
Drapeau du Nicaragua Nicaragua [1]
Drapeau du Qatar Qatar [1]
Drapeau de Roumanie Roumanie [1]
Drapeau de Serbie Serbie  
Drapeau de Sint Maarten Sint Maarten [1]
 
 
 
Vous pouvez utiliser l’outil mis à disposition par Emirates pour vérifier si votre destination impose des conditions particulières (passeport ou visa).
 
L’auteur ne prend aucune responsabilité quant à l’exactitude de ces informations. Contactez la mission diplomatique de votre pays de destination avant de vous y rendre.
 
Dernière mise à jour : Octobre 2024

Rapport du Nouveau Modèle de Développement : un coup d’épé dans l’eau?

J’ai lu (quasiment toutes) les 170 pages du rapport de la Commission du Nouveau Modèle de Développement. Très joli rapport comme prévu (au vu de la qualité des membres), mais malheureusement avec beaucoup de wishful thinking.

Le diagnostic n’a rien de nouveau et terrifiant en même temps. Il reprend ce qui a été dit pendant ces 10-15 dernières années sur les problèmes du Maroc. La Fondation Abderrahim Bouabid avait par exemple sorti un rapport en 2010 sur les problèmes entravant le développement du Maroc, et les rédacteurs étaient traités de nihilistes rétrogrades incapables de voir tous les progrès faits par le Maroc. Si on se base sur ce diagnostic fait par le rapport du CSMD, on devrait virer TOUS les responsables sur les 20 dernières années et ne plus jamais les rappeler. Or, c’est exactement le contraire qui se passe. A chaque vague de nominations, un jeu de chaises musicales se met en place, n’épargnant que les plus âgés, fatigués et usés après des décennies de service.

Les remèdes proposés sont nombreux et détaillés dans une annexe à part (pour les plus téméraires). Certains sont déjà en cours d’application (comme la couverture sociale généralisée), d’autres sont en contradiction avec ce qui se fait en ce moment même.

Quelques exemples :

– Le rapport (p. 77) insiste sur l’importance d’avoir des médias autonomes (et donc indépendants). Or, une concentration des TV publiques (SNRT, 2M et Medi1TV) est en cours dans un seul et unique pôle publique, dans ce qui risque de devenir une Pyongyang TV. Nous sommes en 2021, et il n’y a toujours aucune TV privée au Maroc (à part Chada TV qui diffuse des clips à la Rotana).

– Le rapport (p. 153) recommande “le renouvellement régulier de la haute fonction publique nationale et locale est un défi auquel il convient d’accorder la plus haute importance à travers des mécanismes de renforcement de son attractivité, d’identification et de sélection d’un vivier de compétences, de valorisation de leadership pour leur permettre de prendre des initiatives pour la résolution de problèmes complexes, sans crainte de sanction, et de valorisation de l’expérience dans les territoires”. C’est justement le contraire qui s’est passé ces dernières années. Les récentes colères successives ont dissuadé les hauts fonctionnaires honnêtes et innovants de postuler à des responsabilités plus élevées. Pourquoi? Plus ils montent en grade, plus le risque de subir une colère inexpliquée et arbitraire augmente. Résultat, des postes importants peuvent rester vacants pendant des années (SG du ministère des finances par exemple, avant qu’il ne soit occupé par M. Chorfi, et à nouveau libre, après son départ à la retraite).

– “Le renforcement des libertés individuelles et publiques et leur protection par le système judiciaire sont une condition nécessaire à la création d’un climat de confiance et à la libération des énergies.” (p. 74). C’est tout le contraire qui se passe chez les journalistes libres. Les arrestations n’en finissent pas, et les derniers cas devant nous sont ceux de Omar Radi, et Soulaimane Raissouni, en grève de la faim depuis 49 jours, et en très sérieux danger de mort.

Alors oui, il y a des propositions qui me plaisent bien, comme celle de déléguer certains services publics à des entreprises sociales (p. 101). On pourrait confier la collecte des déchets recyclables à des coopératives de chifonniers, la gestion d’une crêche à une association, l’exploitation de terrains en friche à des coopératives agricoles…

D’autres objectifs sont tout aussi nobles (et ils sont très nombreux dans le rapport), mais les rapports précédents (Cosef 2000, Cinquentenaire 2005), étaient tout aussi explicites sur beaucoup d’autres objectifs, sans succès malheureusement.

Le rapport occulte (évidemment) le noeud du problème du Maroc : son système politique. Aucune réforme profonde n’est possible au Maroc sans réforme du système politique et l’instauration d’une véritable monarchie parlementaire, avec une réelle reddition des comptes et une indépendance des pouvoirs.

Le rapport s’étale par exemple beaucoup sur les conflits d’intérêts et de la nécessité que les institutions constitutionnelles fassent leur travail. On a tous suivi le feuilleton du conseil de la concurrence vs. le lobby des pétroliers. Ils s’en sont sortis indemnes.

Ou alors comment expliquer qu’un président de région et le maire d’une ville, soient condamnés en appel à de la prison ferme pour détournement de fonds publics, mais continuent à exercer leurs fonctions comme si de rien n’était (le recours en cassation n’est pas suspensif de la peine de prison).

Le problème n’est donc pas l’existence d’institutions constitutionnelles, mais leur réelle indépendance dans leur prise de décision.

Autre exemple : le rapport insiste beaucoup sur la régionalisation avancée qui doit s’appuier très largement sur les walis et non sur les conseils élus (dépourvus de moyens et de prérogatives). Comment qualifie-t-on un système où un wali intervient à la place d’un élu, même pour choisir l’espèce d’arbres à planter sur un trottoir?

Le rapport appelle également à abolir la rente sous toutes ses formes. Pourquoi voulez vous que le système politique l’abolisse alors qu’il en vit depuis des siècles? C’est le meilleur moyen de fidéliser un cercle restreint servant de bouclier à toute épreuve.

Pour résumer : il s’agit d’un rapport avec un diagnostic connu, des remèdes sympathiques, mais souvent homéopathiques. Et un sort tout tracé, à l’image du Rapport du Cinquantenaire : consommation médiatique intense pendant quelques jours et application sélective des recommendations, en fonction des intérêts du moment.

Et rendez-vous au prochain rapport. Inchallah.

Covid-19, Morocco Chief Digital Officer?

La crise sanitaire que traverse le Monde en ce moment a des conséquences humaines terribles et un impact économique catastrophique sur beaucoup de secteurs.

Mais s’il y a un secteur qui devrait plutôt bien s’en sortir, c’est bien celui du digital. Au Maroc, nous avons pris beaucoup de retard, et la crise du Covid-19 a permis de faire tomber beaucoup de barrières psychologiques et décisionnelles qui bloquaient à la fois les décideurs et les citoyens/consommateurs.

L’impact sur les secteurs du digital n’a pas été uniforme. Certains vont connaitre des croissances exponentielles. D’autres vont sévèrement pâtir de la crise.

E-Gov :

S’il est aujourd’hui possible de déclarer et payer ses impôts en ligne, de déposer des réclamations à distance ou de déposer sa demande de permis de construire en ligne dans beaucoup de communes, la grande majorité des procédures est loin d’être digitalisée.

Il est toujours impossible de créer son entreprise en ligne, de légaliser un document ou demander une copie conforme sur Internet, ni d’effectuer des opérations à distance auprès du greffe du tribunal de commerce pour les entreprises.

Mais cette crise du Covid-19 a permis d’accélérer la mise en place de certains projets qui auraient pu attendre des mois, voire des années avant de voir le jour. Ainsi, l’Agence du Développement du Digital a lancé 10 jours après le début du confinement, 3 services : le bureau d’ordre digital, le guichet électronique des courriers et le parapheur électronique. Idem pour la distribution des aides directs de l’État pour les plus impactés par la crise : la plateforme de distribution des aides a été mise en place en quelques jours, alors qu’on en parle depuis une bonne décennie. La collecte de données d’une telle quantité par l’État sur des millions de foyers en si peu de temps, aurait été impossible en temps normal. En espérant que cela serve de premier pilier au Registre Social Unique.

Si cela prouve une chose, c’est que le blocage de dizaines de projets e-gov au Maroc est surtout d’ordre décisionnel, et n’est absolument pas technique ou financier. Quand l’administration veut, elle peut.

E-commerce

Dans l’impossibilité d’ouvrir leur magasins, ou face au risque sanitaire que pourraient encourir leurs clients, des dizaines d’enseignes ont (enfin) opté à la hâte pour le e-commerce.

Si certaines enseignes de grandes distribution ont opté pour des méthodes artisanales improvisées et qui démontrent leur impréparation à la situation, comme se greffer à des plateformes de livraison (comme Glovo ou Jumia Food), d’autres ont lancé des sites de e-commerce en bonne et due forme. C’est même devenu pour pour certaines la seule source de chiffre d’affaires (suite à la fermeture de leurs magasins physiques) durant les semaines passées. Elles ont dû adapter leurs process et leurs chaines logistiques à ce nouveau mode de fonctionnement, et aux contraintes sanitaires actuelles.

Et puis, on savait le client marocain très réticent au paiement en ligne (plus de 95% des paiements se faisaient en cash à la livraison). Mais par la force des chose, et pour limiter le risque de transmission du virus via les billets de banque, beaucoup ont enfin sorti leurs cartes bancaires pour payer en ligne.

Cette crise promet d’être un vrai catalyseur pour le e-commerce au Maroc. A condition de résoudre l’épineuse question de la rentabilité, qui, à mon avis, ne sera résolue que par un positionnement “brick and clicks”, c’est-à-dire en déployant une vitrine e-commerce s’appuyant sur un réseau de magasins physiques.

EdTech

Avec le confinement forcé, et l’arrêt des cours dans les écoles et universités, le Ministère de l’Education Nationale a déployé en quelques jours un important système de cours en ligne et sur les chaînes TNT publiques. Encore une fois, ce qui paraissait impossible ou qui devait prendre des années, n’a pris que quelques jours pour être déployé.

Les plateformes d’EdTech (Education Technology) qui permettent une interaction entre les professeurs et les élèves, mais aussi avec les parents et l’administration, sont aujourd’hui plus que nécessaires et complémentaires aux cours présentiels. Cela permet un suivi pointu de l’acquisition des compétences par les étudiants, mais aussi d’offrir un contenu de très haut niveau pour compenser le niveau pas toujours bon de certains professeurs.

Cela pourrait même faire partie de la solution à la surcharge des amphithéâtres de beaucoup d’universités marocaines.

FinTech

Quand l’État a voulu distribuer les aides directes à des millions de marocains touchés par la crise, il a opté pour la distribution en cash. Pour la simple raison que le mobile money est quasi-inexistant au Maroc, malgré le tapage médiatique qui a accompagné l’attribution des agréments, et le lancement de certains services.

Les raisons sont multiples : taux de bancarisation assez élevé par rapport aux pays d’Afrique subsaharienne pris en référence pour ce projet (~60% vs. ~10%), réseau d’acceptation très faible chez des commerçants inquiets des possibilités de traçabilité fiscale, culture du cash très dominante, faibles revenus des populations cibles…

Le cash a encore de beaux jours devant lui. Et à moins d’une révolution culturelle et réglementaire, ce n’est pas demain que l’on verra une migration de masse vers le mobile money et l’émergence de vrais startups de fintech au Maroc.

HealthTech

La crise du Covid-19 a eu un impact insoupçonné sur le secteur médical : la chute des consultations physiques. Les patients ne souhaitant pas prendre de risque en se rendant dans les hôpitaux, cliniques ou cabinets médicaux, n’ont eu de choix que d’appeler leurs médecins par téléphone ou appels vidéos.

Si certaines startups offrent aujourd’hui la téléconsultation qui se résume à de simples appels vidéos, il serait temps de voir d’autres services proposant une intégration de tous les acteurs de santé autour du patient (médecins, pharmaciens, biologistes, imagerie médicale…), voire des appareils de prises de mesures à distance pour optimiser les parcours de clients, et réduire les déserts médicaux.

Logiciels B2B

Si beaucoup des grandes entreprises ont pris le virage technologique en digitalisant une bonne partie de leurs process, la grande majorité des TPME n’y sont pas encore. Faute de moyen ou de volonté. La crise du Covid-19 a démontré plus que jamais la nécessité d’opter pour des logiciels de gestion sur le cloud, de digitaliser tous les process papier.

La tendance qui se dégage par ces temps de crise chez beaucoup d’entreprises, est la repriorisation et l’accélération de projets devenus, par la force des choses, stratégiques.

Conclusion

Cette crise ressemble beaucoup à une situation de guerre. Et parmi les effets d’une économie de guerre, l’installation d’un “effet de cliquet” théorisé par l’économiste James Duesenberry en 1949. Il le définit comme un effet empêchant le retour en arrière d’un processus une fois un certain stade dépassé. Nous espérons tous, qu’une fois cette crise sanitaire dépassée avec le moins de dégâts humains et économiques possibles, qu’un effet de cliquet s’installe durablement, avec un effet favorable sur tous les secteurs du digital.

Le Covid-19 aura alors réussi là où beaucoup de stratégies ont échoué, et méritera son titre de Morocco Chief Digital Officer.

Covid-19 : L’application de tracking des marocains doit être open source

Le gouvernement marocain a lancé le développement d’une application mobile permettant le traçage des contaminations du Covid-19. Elle permettra de tracer les contacts physiques de tous ceux qui l’auront installée (en utilisant le GPS et/ou le Bluetooth), et d’avertir tous ces contacts en cas de contamination de l’un d’entre eux par le Covid-19. Couplée au testing massif, cette application pourrait être un moyen efficace pour lutter contre cette pandémie à l’échelle nationale, et d’identifier très rapidement tout foyer, d’autant plus que, selon l’ANRT, 75% des marocains disposent d’un smartphone.


D’autres pays comme Singapour, la Corée du Sud, la Chine, le Ghana, la République Tchèque l’ont fait. Celle du Royaume-Uni est en cours de développement. Idem pour la France où l’INRIA pilote le projet, et où un débat parlementaire devrait s’ouvrir incessamment pour discuter des répercussions lourdes de ce type d’applications sur les libertés individuelles et la protection des données personnelles.

Au Maroc, ce type de débat ne semble pas d’actualité aujourd’hui, ce qui est une aberration totale. L’Etat marocain ne jouit pas des meilleures réputations en termes de protection des données personnelles et des libertés individuelles. Mais d’après le document de référence publié par plusieurs supports de presse, le traitement des données devra se faire sur le téléphone lui même, et non sur un serveur distant. La seule garantie de non utilisation de ces données à des fins autres que celles de traçage des contaminations du Covid-19, serait de publier l’intégralité du code source de l’application développée. Une fois ce code source ouvert, il pourra être audité par des experts informatiques pour s’assurer des protections adéquates des donnés personnelles collectées.

D’autres pays ayant recours à ce type d’applications en ont déjà publié le code source, afin justement, de rassurer leur population sur l’utilisation de leurs données personnelles (Singapour, Israel, République Tchèque…). Résultat : des millions d’utilisateurs ont adhéré à la démarche et ont installé l’application afin de contenir le virus.

Encore une fois, ne ratons pas l’occasion de redonner confiance aux citoyens dans leur État. Ce serait dommage que la majorité des marocains renoncent à installer ce type d’applications par méfiance. Car sans adhésion massive de la population à ce type d’initiatives, elles seront tout simplement inutiles.

Cette tribune a été publiée sur Medias24

L’OFPPT, le nouveau msid?

Cela fait plusieurs fois maintenant, que le roi souligne dans ses discours l’importance de la formation professionnelle comme débouché pour les jeunes. Il a encore insisté dessus lors du discours du 20 août 2019 :

A cet égard, Je tiens une nouvelle fois à souligner l’importance de la formation professionnelle pour la qualification des jeunes, notamment en milieu rural et dans les zones périurbaines. Grâce à une insertion professionnelle réussie, ces jeunes deviendront productifs et contribueront au développement du pays.

En effet, l’obtention du baccalauréat et l’accès à l’université ne constituent pas un aboutissement en soi. Ce sont des étapes dans le parcours académique. Ce qui importe vraiment, c’est d’acquérir une formation qui ouvre des perspectives d’insertion professionnelle et de stabilité sociale.

Je ne me lasserai donc jamais de mettre en avant le rôle de la formation professionnelle, du travail manuel dans l’insertion des jeunes.

Revenons 20 ans en arrière. A la fin du règne de Hassan II (et prolongée à l’intronisation de Mohammed VI) , une Commission spéciale éducation-formation (Cosef) avait été constituée pour établir les bases de réforme du système éducatif marocain, déjà très mal en point.

Un des objectifs énoncés était de généraliser l’enseignement fondamental, avec des objectifs chiffrés sur la cohorte 1999-2000, qui devait être suivie à différentes étapes de sa scolarisation.

Les objectifs étaient clairs et ambitieux (on les trouve toujours sur le site du Ministère de l’Education Nationale) :
“Aux horizons ci-après, les élèves inscrits en première année du primaire parviendront :
– En fin d’école primaire, pour 90% d’entre eux en 2005;
– En fin d’école collégiale, pour 80% d’entre eux en 2008 ;
– En fin d’enseignement secondaire (y compris la formation professionnelle et technologique, l’apprentissage et la formation alternée), en 2011, pour 60% d’entre eux ;
– A l’obtention du baccalauréat, pour 40% d’entre eux, en 2011″

Quelques années plus tard, les résultats sont édifiants et sans appel :
Pour la cohorte 2002-2013 : 34% ont terminé le primaire (2007), 19% ont terminé le collège (2010), 7% le secondaire (2013) et à peine 4% ont obtenu le baccalauréat.

Face à cet échec monumental, on en est 20 ans après à recommander une redirection massive vers la formation professionnelle. Outil pour résorber le chômage? Vraiment?

Le HCP a publié une étude en 2018 sur l’insertion professionnelle des lauréats de la formation professionnelle. Verdict : « L’analyse des résultats montre que le rendement externe de la formation professionnelle, en termes de chômage de ses promotions comme en termes d’adéquation de leur formation à l’emploi, est très largement moins favorable à celui des promotions de leurs homologues issus de l’enseignement général ».
Les lauréats de la formation professionnelle enregistrent un taux de chômage de 24,5% tandis que celui des diplômés de l’enseignement général est de 16%.

Dans un monde du travail qui est déjà en train d’être bouleversé par l’intelligence artificielle (IA) et l’automatisation à outrance, il est inconcevable de pousser des millions de jeunes vers des formations manuelles dans des métiers comme le câblage automobile/aéronautique appelés à être massivement robotisés, ou les métiers de centres d’appels déjà en train d’être remplacés par l’IA (beaucoup d’experts prévoient leur disparition à un horizon de 10 ans).

La seule explication de tout cet acharnement pour diriger un maximum de marocains vers la formation professionnelle, est une volonté de produire des sujets soumis, sans sens critique, et non des citoyens avertis et formés dans les sciences humaines et sciences exactes.

Et cela rappelle étrangement une anecdote racontée par Pr. Mohamed Chafik, ex-directeur du collège royal. Il fut chargé par Hassan II en 1968, d’élaborer un rapport sur les écoles coraniques. La conclusion du rapport du Pr. Chafik était sans équivoque : les msids cultivent la culture de la soumission, en empêchant le développement de tout sens critique et affaiblissent la personnalité de l’enfant, en utilisant les châtiments corporels et l’apprentissage répétitif.

Au lieu de supprimer ou limiter l’expansion des écoles coraniques, Hassan II ordonna leur généralisation au détriment des écoles modernes, censées inculquer les valeurs d’ouverture et du sens critique. Avec les résultats que l’on connait.

50 ans plus tard, le schéma semble se reproduire.

Ce que les pétroliers ont pompé de la poche des marocains

Pendant des dizaines d’années au Maroc, le prix des hydrocarbures était subventionné ET réglementé au Maroc. L’État accordait une subvention aux hydrocarbures via la caisse de compensation. Il fixait en même temps le prix maximum à la pompe. Mais depuis 2013, le gouvernement Benkirane a progressivement levé cette subvention, pour l’annuler complètement début 2015. Dès lors, les hydrocarbures n’étaient plus subventionnés, mais leur prix maximum était toujours fixé par l’État, considérant que c’est une denrée sensible et essentielle à toute économie (tout comme les médicaments par exemple). Mais depuis décembre 2015, Benkirane décide la libéralisation totale de ces prix, laissant au marché le soin de les fixer. La concurrence devait donc jouer théoriquement son rôle pour faire baisser les prix et offrir au consommateur le meilleur rapport qualité prix.

Sauf que depuis cette date, il faut être dupe pour ne pas se rendre compte de l’augmentation sensible des prix des hydrocarbures à la pompe. Malgré la baisse du prix du baril en 2016, et surtout en 2017, les prix ne variaient que très peu à la baisse. Mais toute hausse du baril était systématiquement et rapidement répercutée sur les consommateurs. Ceci alimentait une forte suspicion d’entente sur les prix, pour permettre aux distributeurs d’hydrocarbures d’engranger un maximum de bénéfices possibles.

Le Conseil de la Concurrence en état de paralysie totale, faute de nomination de son Président et de ses membres, était (et est toujours) dans l’incapacité d’enquêter sur cette éventuelle entente, et d’infliger des amendes aux distributeurs de carburants si une entente sur les prix ou un abus de position dominante avait été constaté.

Le fait que Aziz Akhennouch (Afriquia, RNI), Mbarka Bouaida (Petrom, RNI) et Rkia Derham (Atlas Sahara, en quasi-duopole de distributeur de carburant dans les provinces du Sahara, USFP) soient membres du gouvernement actuel (et de celui de Benkirane pour les deux premiers) renforce cette suspicion de connivence entre l’exécutif et le secteur de distribution d’hydrocarbures.

Pour ne rien arranger aux choses, le rapport produit par la commission exploratoire parlementaire sur les prix des hydrocarbures exonère les distributeurs de toute responsabilité dans l’augmentation des prix, et considère que l’État est le plus grand gagnant dans la libéralisation des prix, et que les prix au Maroc sont parmi les plus bas de la région (!!). Une première version de ce rapport qui a fuité dans la presse, a au contraire incriminé les pétroliers d’avoir outrageusement augmenté leurs marges depuis la libéralisation des prix en décembre 2015.

Qu’en est-il vraiment?

A l’examen des comptes 2015 et publiés sur Inforisk ou par l’OMPIC, ainsi que sur le site de l’AMMC (en ce qui concerne Total Maroc cotée en bourse), l’analyse des marges est plus qu’édifiante.

Augmentation de la marge brute de 1,5 à 3,3 fois entre 2015 et 2016

La marge brute est la différence entre le prix d’achat des marchandises revendues et le prix de leur vente. Dans le cas des distributeurs d’hydrocarbures, il s’agit à plus de 95% de carburants. Le reste étant surtout des huiles de vidange et autres produits complémentaires vendus dans les stations services.

En analysant les comptes des 4 plus grands distributeurs du marché, totalisant une part de marché de 72%, la marge brute a progressé entre 2015 et 2016 (soit avant et après la libéralisation des prix) de 1,5 fois pour Afriquia à plus de 3,3 fois pour Total Maroc. (Les comptes 2015 de Petrom n’étaient pas disponibles).

Une marge nette jusqu’à 8% pour Total Maroc !

La marge nette est le rapport entre le résultat net (c’est-à-dire le gain après avoir soustrait toutes les charges d’achat et de fonctionnement) et le chiffre d’affaires des distributeurs. Les marges nettes ont tout simplement explosé après la libéralisation des prix en décembre 2015.

Des distributeurs comme Vivo Energy (Shell) qui ne faisaient qu’un petit 1,4% de marge nette, a multiplié sa marge par 4 pour atteindre 5,7%. De même pour Afriquia et Total Maroc.

Cette dernière, réalise par exemple pour le même chiffre d’affaires de 10,5 milliards de DH, un bénéfice de 800 millions de DH en 2016, contre “seulement” 400 millions de DH en 2015.

Le gain additionnel de ces sociétés en quelques mois est tout simplement phénoménal. En multipliant le volume écoulé sur le marché marocain par la marge supplémentaire engrangée par ces distributeurs, on arrive à un chiffre entre 15 et 17 milliards de DH en 30 mois de libéralisation des prix. Une partie de cette manne (20 à 30%) est allé dans les caisses de l’Etat sous forme d’impôt sur les sociétés, mais la majeure partie est allée renflouer les poches des actionnaires de ces sociétés, dont certains se retrouvent propulsés au premier rang des personnes les plus riches au Maroc.

Faut-il récupérer cet argent, indument prélevé des poches des marocains? Oui. Ces sociétés ont profité des connivences entre politiques et business pour passer des réformes en leur faveur, sans aucun contrôle de l’État. Comment le récupérer? En temps normal, le Conseil de la Concurrence aurait pu enquêter sur l’absence de concurrence entre ces sociétés et sur les prix très proches pratiqués par celle-ci. La loi permet d’infliger des amendes proportionnelles au chiffre d’affaires en cas d’infraction avérée. Le Conseil de la Concurrence étant hors service pour le moment, cet argent doit être récupéré via des taxes exceptionnelles, mais non rétroactive, puisque la loi l’interdit. Une innovation fiscale plus que nécessaire pour rétablir, ne serait-ce qu’un semblant de justice fiscale dans ce pays.

Au royaume des grands projets, du rêve à la (dure) réalité

 

Les chiffres annoncés par le groupe chinois Haite pour son futur parc industriel à Tanger donnent le tournis: 10 milliards de dollars d’investissement sur 10 ans. 100.000 emplois créés par 200 compagnies installées sur 2.000 hectares.

L’ambitieux plan dévoilé en 2016 par le sulfureux Ilyas El Omari a d’abord été accueilli par un prudent scepticisme, la société porteuse du projet n’employant que mille personnes dans sa Chine natale. De plus, le timing de l’annonce pendant une période pré-électorale, propice à des promesses qui “n’engagent que ceux qui y croient” – comme disait Jacques Chirac, la rendait encore moins crédible.

Mais depuis mars dernier, cette promesse porte désormais une caution royale, matérialisée par une inauguration par le Souverain. Est-ce une garantie de réalisation? Pas si sûr.

L’histoire récente du Maroc regorge de contre-exemples trop vite oubliés.

En 1997, le PDG du conglomérat coréen Daewoo avait annoncé à Hassan II son intention de construire des unités de fabrication de produits électroniques et automobiles. Une énorme parcelle de terrain jouxtant la route nationale du côté de Nouaceur a même été réservée au projet. Vingt ans après, rien n’est sorti de terre.

En 2006, le groupe émirati Emaar avait promis, devant Mohammed VI, un investissement de 3 milliards de dollars dans un projet de réhabilitation de la façade atlantique de Rabat sur 331 hectares. Aujourd’hui, seul subsiste un bureau de vente fantôme sur la corniche de Rabat.

Emaar s’était aussi engagé la même année à investir 1,4 milliard de dollars sur 600 hectares à la station de ski d’Oukaïmden, afin de la mettre au niveau des plus grandes stations des Alpes! Là aussi, hormis quelques articles de presse, nulle concrétisation.

Certes, le Maroc a réussi de grands coups en termes d’investissements étrangers, à l’image de celui de Renault Tanger Med (qui aurait pu tomber à l’eau sans l’intervention salvatrice de la CDG en 2009), ou celui en cours de PSA à Kénitra. Or, montés et structurés méticuleusement par des équipes qui ne cherchaient pas que l’effet d’annonce, ces projets obéissaient à une logique industrielle faisant partie d’une stratégie globale de ces groupes.

Autrement, le Maroc est trop souvent la victime consentante d’annonces démesurées de groupes étrangers cherchant à gonfler artificiellement leur cours boursier, à obtenir des facilités dans leurs propres pays ou à servir les ambitions purement personnelles de leurs dirigeants.

Ces projets fantômes recèlent des dangers bien réels: ils risquent de créer un effet d’éviction vis-à-vis des investisseurs sérieux, lesquels peuvent être refroidis par la raréfaction du foncier qui en découle, par la pénurie de main d’œuvre dans tel bassin d’emploi ou par l’engorgement des capacités logistiques sur telle voie ferrée ou port à proximité.

D’où la tentation de chercher d’autres pays plus propices à leurs investissements. Tout l’enjeu pour le Maroc est de mieux comprendre les circuits de prise de décision chez les grands investisseurs, et leurs plans à moyen et long termes. Cela nous éviterait de bien malheureuses aventures.

Ne nous avait-on pas prévenus à l’école de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué? A fortiori quand il s’agit d’un panda.

 Tribune initialement publiée le 7 juillet 2017 sur Medias24